Des taux négatifs pour combien de temps ?
De toutes les mesures prises par la BCE depuis 2014, celle sur les taux d’intérêt négatifs (- 0,4 %) sur les dépôts bancaires est sans doute la plus controversée. Accusés d’être une taxe sur les banques, ces taux négatifs seraient aussi une cause de l’effondrement des taux longs obligataires. Ces critiques ne sont pas sans fondement, mais il convient de garder à l’esprit l’objectif spécifiquement associé à cette mesure. Rappelons d’abord qu’elle n’est pas l’apanage d’économies affaiblies. Dans le club des taux négatifs, l’eurozone est en bonne compagnie, au côté de la Suède (- 0,50 %) et de la Suisse (- 0,75 %), deux économies qui ont clairement surperformé depuis le début de la crise. Si les banques centrales de ces deux pays ont fait passer leur taux en territoire négatif, c’est dans le but précis d’affaiblir le taux de change de leur monnaie afin d’accroître l’inflation importée. Il en va de même pour la BCE. Mais allons plus loin : la baisse de l’inflation importée est due à la faiblesse concomitante des prix des matières premières et du dollar. C’est ce dernier qui est ici visé par nos banques centrales. Au cours de chaque précédent cycle de l’économie américaine, la Fed avait procédé à un relèvement trimestriel de 25 points de base de son taux directeur, entraînant mécaniquement un affermissement de sa monnaie. Ce n’est pas le cas cette fois-ci. La valse-hésitation de la Fed, promettant toujours un relèvement «pour bientôt», contrarie l’ajustement des cycles entre les deux côtés de l’Atlantique : la croissance en zone euro (2014) est bien plus récente qu’aux Etats-Unis (2010). En ce sens, c’est à Washington plutôt qu’à Francfort que va se décider l’avenir des taux négatifs en zone euro.