Vers de nouvelles règles budgétaires en zone euro ?
Les règles budgétaires du pacte de stabilité et de croissance ont été temporairement suspendues en mars 2020 pour faire face à la crise. Il est prévu de les réactiver en 2023. Pourtant, ces règles sont jugées obsolètes par la plupart des économistes. Les seuils numériques identiques pour chaque pays en matière de dette (60 % du PIB) et de déficit (3 % du PIB) n’ont pas de fondement théorique. De plus, ces règles se sont révélées procycliques, et donc contre-productives. Sans compter qu’elles reposent sur des estimations des déficits structurels qui sont par nature fragiles.
La critique n’est pas nouvelle, mais elle est exacerbée par la crise de la Covid. En particulier parce qu’il y a davantage de degrés de liberté pour la politique budgétaire lorsque les taux d’intérêt sont très inférieurs à la croissance du PIB.
Il existe plusieurs propositions d’économistes pour réformer ces règles. Pour garantir la soutenabilité des dettes, l’examen du solde primaire, des charges de la dette, du niveau initial de la dette et du ratio des dépenses publiques au PIB devraient jouer un rôle dans l’analyse des efforts requis. Cela signifie que des règles spécifiques à chaque pays seraient en définitive plus appropriées qu’une règle unique, basée sur le déficit.
Il n’y a pas d’unanimité en la matière, ce qui rend improbable un accord à court terme. Les règles actuelles sont très symboliques, notamment pour les pays les moins endettés, qui estiment avoir déjà fait de grandes concessions lors de la mise en place du fonds de relance Next Generation EU (NGEU). Les débats ne font que commencer. La couleur de la coalition au pouvoir en Allemagne après les élections du 26 septembre sera déterminante. La France, qui prendra la tête du Conseil de l’UE au premier semestre 2022, profitera sans doute de cette opportunité pour mettre cette question sur la table.
Didier Borowski est responsable de la recherche sur les politiques macroéconomiques au sein de l’Amundi Investment Institute. Auparavant, il a exercé plusieurs fonctions : responsable de la stratégie Taux et Changes, co responsable de l’équipe de Stratégie et Recherche économique, responsable de la macroéconomie puis plus récemment responsable global views. Avant de rejoindre Amundi, il était économiste et stratégiste senior de Société Générale Asset Management (2000-2009). Didier Borowski a commencé sa carrière au sein de la Direction de la Prévision du Ministère de l’économie et des finances. Il a également exercé les fonctions d’expert auprès de la Commission européenne. Didier Borowski est Docteur ès sciences économiques. Il a été Professeur associé à l’Université Paris Nord (2007-2011) puis a enseigné plusieurs années à l’université Paris-Dauphine.
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