La Cour de cassation vient de rendre un arrêt qu’elle signale elle-même comme important (Com. 22 mars 2017, FS-P+B+I, n° 15-15.361). Il contribue à renforcer l’efficacité d’une cession Dailly à titre de garantie effectuée en période suspecte et alors que la société cédante est désormais soumise à une procédure de liquidation judiciaire.
Par Arnaud Reygrobellet, avocat of counsel, CMS Bureau Francis Lefebvre
Deux considérations techniques doivent être rappelées avant de présenter l’apport de cette décision.
D’une part, lorsqu’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire est ouverte, le tribunal doit fixer la date de cessation des paiements du débiteur et peut, à cet effet, remonter dans le temps jusqu’à 18 mois en arrière à compter de la date du jugement. Cette date définit une «période suspecte», qui court jusqu’au jugement d’ouverture. Pendant cette période, un certain nombre d’opérations peuvent être annulées. Il en va en particulier ainsi de «tout paiement, quel qu’en ait été le mode, pour dettes non échues au jour du paiement» (art. L. 632-1, 3° C. com.).
D’autre part, la cession de créances par voie de bordereau Dailly peut intervenir selon deux modalités : soit la cession s’opère sous une forme qui s’apparente à un escompte ; soit la cession est effectuée à titre de garantie. Dans cette seconde configuration, il s’agit pour le banquier cessionnaire de garantir, grâce aux créances mentionnées sur le bordereau, le remboursement d’une dette (souvent un crédit de trésorerie) contractée par le cédant. Certes, dans les deux cas, la cession transfère au cessionnaire la propriété des créances cédées (art. L. 312-24 C. mon. fin.). Mais les effets juridiques de ce transfert de propriété diffèrent. Plus exactement, la propriété, dans l’hypothèse d’une cession à titre de garantie, est une propriété fiduciaire. Ce qui induit des conséquences très originales que met en lumière l’arrêt commenté.
Au cas particulier, un crédit de trésorerie avait été consenti à une société sur...