La loi relative à l’égalité réelle outre-mer (loi n° 2017-256 du 28 février 2017) est venue modifier les différents dispositifs d’incitation fiscale à l’investissement productif outre-mer (articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du Code général des impôts), en supprimant la condition selon laquelle «l’investissement doit être un investissement initial».
Par Anne-Sophie Rostaing, avocate associée, et Charlotte Guincestre, avocate, CMS Bureau Francis Lefebvre
Toutefois, cette suppression textuelle ne modifie pas le droit positif.
En effet, le bénéfice des dispositifs précités reste expressément subordonné, pour les DOM et Saint-Martin, au respect du règlement général d’exemption par catégorie n° 651/2014 du 17 juin 2014 («RGEC»), qui permet aux Etats membres de l’Union européenne d’adopter des régimes d’aide aux entreprises sans avoir à les notifier au préalable à la Commission.
Or, selon le RGEC, l’aide à l’investissement à finalité régionale ne peut concerner que les aides octroyées pour un investissement initial (excluant l’investissement de renouvellement).
La suppression en droit interne de la référence au caractère «initial» des investissements n’a donc pas d’impact sur le champ d’application des différents dispositifs d’incitation fiscale :
– dans les DOM et à Saint-Martin, seuls étaient déjà éligibles, et seuls demeurent à ce jour éligibles, les investissements «initiaux» au sens du RGEC1 ;
– dans les COM et en Nouvelle-Calédonie, les investissements des particuliers (article 199 undecies B) comme ceux des entreprises (article 217 duodecies) pouvaient déjà porter, et continuent à pouvoir porter, sur tout type d’investissement.
Quid du maintien de la notion d’«investissement de remplacement» en droit interne, pour la détermination de l’assiette2 de l’avantage fiscal ?
Ce maintien se justifie pleinement pour les COM et la Nouvelle-Calédonie, non concernés par le RGEC. Mais il s’explique également pour les DOM et Saint-Martin, dans la mesure où la notion d’investissement initial retenue par le RGEC est bien moins étroite que la notion d’investissement de remplacement retenue en droit interne.
Pour mémoire, constitue un investissement initial au sens du RGEC «tout investissement dans des actifs corporels et incorporels se rapportant à la création d’un établissement, à l’extension des capacités d’un établissement existant, à la diversification de la production d’un établissement vers des produits qu’il ne produisait pas auparavant ou à un changement fondamental de l’ensemble du processus de production d’un établissement existant (…)».
Ainsi, certaines acquisitions considérées en droit interne comme de simples investissements de remplacement sont néanmoins susceptibles d’être qualifiées d’investissements initiaux au regard du RGEC, et donc d’être éligibles à l’aide fiscale.