La Cour de justice de l’Union européenne dans son arrêt du 14 juillet 2016 revient sur la nature juridique de l’action spécifique du droit français pour rupture brutale des relations commerciales établies au sein de l’UE. Loin d’être théorique, cette remise en cause a des conséquences pratiques importantes sur la compétence juridictionnelle et la loi applicable au litige.
Par Jérôme Saleur, avocat associé, et Aude Ducret, avocat, Lamy Lexel Avocats Associés
Le débat sur la nature juridique de l’action pour rupture brutale des relations commerciales établies fait l’objet d’un nouveau rebondissement ! En droit interne, la question a été tranchée depuis plusieurs années par la Cour de cassation qui juge de façon constante qu’elle est délictuelle (C. cass. com, 6 février 2007, n° 04-13178 ; 13 janvier 2009, n° 08-13971 ; 15 septembre 2009, n° 07-10.493). Dans un récent arrêt du 14 juillet 2016, la Cour de justice de l’Union européenne revient sur cette nature dans le cadre d’un litige intra-UE.
La réponse à cette question a des conséquences pratiques importantes pour le juriste français dont l’entreprise a des relations commerciales avec d’autres Etats membres de l’Union européenne. En effet, la qualification détermine la compétence juridictionnelle, la loi applicable et donc, a fortiori, l’application des dispositions de l’article L. 442-6 I. 5° du Code de commerce.
Prenons un exemple concret : une société dont le siège social est en France distribue sur le territoire national des produits fabriqués par une société dont le siège est situé en Allemagne et livrés dans les locaux de la filiale française du distributeur en Allemagne.
Le contrat de distribution exclusive à durée indéterminée qui lie les deux sociétés prévoit une clause de préavis de quatre mois pour rompre le contrat, quelle que soit la partie à l’initiative de la rupture. Fin 2015, la société de droit allemand notifie à la société de droit français la fin de leurs relations commerciales commencées huit ans plus tôt.