Les circonstances de l’espèce étaient les suivantes : la société Siminvest était en état de cessation des paiements et faisait «l’objet d’une enquête ordonnée par le tribunal de commerce».
Par Benoît Provost, avocat counsel, et Pierre Bondu, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre
Une remontée de trésorerie avait été opérée par une des sociétés du groupe, la société P08.1, au profit de Siminvest, ces deux sociétés ayant un dirigeant commun. Une partie des sommes remontées correspondait au règlement de factures relatives à des prestations de services effectuées par Siminvest à la société P08.1, mais plus de 700 000 euros avaient été versés sans contrepartie, dans «l’unique intérêt de la société Siminvest». La société P08.1 s’est alors aussi retrouvée en état de cessation des paiements. Le dirigeant commun a été poursuivi pour abus de biens sociaux. En première instance, le tribunal a relaxé le dirigeant, retenant l’idée d’intérêt de groupe. La cour d’appel a retenu la qualification de l’abus de biens sociaux, infirmant le jugement de première instance, et a condamné le dirigeant qui avait «délibérément sacrifié la société P08.1 et placé celle-ci dans l’impossibilité absolue de désintéresser ses créanciers». Le dirigeant s’est pourvu en cassation, invoquant l’absence de caractérisation de l’élément intentionnel exigé par l’article L. 241-3 4° du Code de commerce. Il critiquait également l’absence de motivation de la peine complémentaire d’interdiction de gérer de cinq ans. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi (Cass. crim. 1er février 2017, n° 15-85199).
Pour caractériser les éléments matériels constitutifs de l’abus de biens sociaux dans ce contexte de groupe de sociétés (défini comme l’«usage contraire à l’intérêt social pour favoriser une société...