Peut-on espérer que l’application directe du nouveau règlement (UE) n° 2016/522 du 17 décembre 2015 en matière d’abus de marché («MAR»), entré en vigueur le 3 juillet 2016 sans la moindre transposition nationale, rétablisse la hiérarchie des normes et mette un terme à certaines dérives de l’AMF, appuyée en cela par la cour d’appel de Paris?
Par Frank Martin Laprade, avocat partner, Jeantet
D ans le cadre de l’application directe du nouveau règlement (UE) n° 2016/522 du 17 décembre 2015 en matière d’abus de marché («MAR»), il va être intéressant notamment d’observer comment sera mise en œuvre la dérogation à l’obligation de publier immédiatement n’importe quelle information privilégiée, lorsque les trois conditions suivantes sont cumulativement réunies : (i) s’il y va de la protection des intérêts légitimes de la société, (ii) si la confidentialité peut être garantie et (iii) si le retard n’induit pas le public en erreur.
Il faudrait commencer par clarifier ce qu’on entend par «induire le public en erreur» puisqu’il s’agit précisément de ne RIEN dire, mais s’agissant d’une sorte de «mensonge par omission», on pourra sans doute raisonner par analogie avec la diffusion d’informations fausses ou trompeuses, ce qui n’est toutefois répréhensible que s’il est démontré que le retardataire savait – ou aurait dû savoir – qu’un tel silence était préjudiciable.
Cela nécessite donc à tout le moins de s’en assurer avant de prendre la décision de différer la publication, ce qui vient s’ajouter à la pression qui semble être mise sur les dirigeants pour collecter dans les meilleurs délais l’ensemble des informations susceptibles de se révéler privilégiées, lesquelles peuvent surgir à tout moment au sein de l’entreprise.
Or, il se trouve qu’en France, la marge de manœuvre semblait particulièrement réduite – voire inexistante – puisqu’il a été décidé par la commission des sanctions...