Depuis le début de l’année, l’administration fiscale dispose du pouvoir d’auditionner des personnes – autres que le contribuable – susceptibles de fournir des informations utiles à la lutte contre l’évasion fiscale internationale. La loi étant peu précise, cette nouvelle procédure soulève de nombreuses interrogations.
Par Xavier Daluzeau, avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre
1. Description de la procédure
La loi de finances rectificative pour 2016 (loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016, art. 19) a instauré au profit de l’administration le pouvoir d’auditionner des personnes – autres que le contribuable – susceptibles de fournir des informations utiles à la lutte contre la fraude ou l’évasion fiscale internationale. Cette nouvelle procédure est codifiée à l’article L. 10-0 AB du Livre des procédures fiscales («LPF»). A ce jour, ses conditions et modalités de mise en œuvre n’ont pas été commentées par l’administration fiscale.
L’administration ne peut user de cette procédure que pour rechercher des manquements aux règles relatives à :
– la résidence fiscale des personnes physiques (article 4 B du Code général des impôts, «CGI») ;
– la déductibilité des commissions versées à un fonctionnaire étranger afin d’obtenir ou conserver un marché (article 39-2 bis du CGI) ;
– les prix des transactions intragroupes internationales («prix de transfert», article 57 du CGI) ;
– les participations détenues par des personnes physiques dans des sociétés financières étrangères soumises à un régime fiscal privilégié (article 123 bis du CGI) ;
– les rémunérations de prestations réalisées en France versées à des sociétés étrangères (article 155 A du CGI) ;
– les règles de territorialité en matière d’impôt sur les sociétés (article 209 du CGI) ;
– les participations détenues dans des entreprises étrangères soumises à un régime fiscal privilégié (article 209 B du CGI) ;
– la déductibilité de certaines sommes payées à un bénéficiaire soumis à un régime fiscal privilégié (article 238 A du CGI).
L’audition peut concerner toute personne, sauf le contribuable susceptible d’être l’auteur de l’un des manquements ci-dessus. Si la loi est peu précise sur l’identité des personnes pouvant être auditionnées, les travaux parlementaires laissent présager une liste étendue, puisqu’ils mentionnent les «clients, fournisseurs, intermédiaires, comptables, salariés, ex-salariés ou même prestataires extérieurs1». Comme la loi prévoit que la personne entendue peut demander le concours d’un interprète, il peut s’agir d’une personne étrangère.
La demande d’audition par un agent de l’administration fiscale doit être reçue ou être remise à la personne au moins huit jours avant la date de l’audition proposée et préciser l’objet de l’audition. Elle indique également la possibilité pour la personne de refuser d’être entendue.
L’audition a lieu dans les locaux de l’administration ou, à la demande de la personne auditionnée, dans d’autres locaux, à l’exclusion des locaux à usage d’habitation (même si ces locaux sont eux-mêmes situés dans des locaux à usage professionnel).