Les sociétés d’un groupe peuvent être tenues solidairement au paiement de l’amende infligée à raison d’une pratique anticoncurrentielle mise en œuvre par l’une d’elles. Mais c’est à la condition qu’elles aient constitué une même entreprise, au sens du droit de la concurrence, au moment de la commission de l’infraction sanctionnée.
Par Elisabeth Flaicher-Maneval, avocat counsel, CMS Bureau Francis Lefebvre.
C’est sur cette notion d’entreprise que vient de se fonder la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour censurer, à deux reprises, dans le cadre des affaires concernant une entente dans le secteur de la vente d’appareillages de communication à isolation gazeuse, la pratique décisionnelle de la Commission en matière de paiement des amendes par des codébiteurs solidaires. La Cour de justice a ainsi estimé, dans un premier contentieux, que l’imposition d’une solidarité de fait entre les sociétés mères successives d’une filiale, pour le paiement de l’amende infligée en raison d’une infraction commise par cette dernière, constituait une violation des principes de sécurité juridique et d’individualisation des peines et des sanctions (CJUE, 10 avril 2014, C-247/11P et C-253/11 P, aff. Areva/Alstom). Selon la Cour, l’instrument de la solidarité ne peut en aucun cas conduire à ce qu’une société supporte le risque d’insolvabilité d’une autre société alors qu’elles n’ont jamais constitué une même entreprise.
Or, en l’espèce, pendant la durée de l’infraction, aucune unité économique n’avait jamais existé entre les trois entités condamnées solidairement, de sorte que les sociétés mères ne pouvaient être considérées comme ayant participé à la même infraction. Si la Commission entendait condamner solidairement la filiale avec chacune de ses sociétés mères avec lesquelles elle avait formé une entreprise distincte au cours de la période d’infraction, la Commission, dont la décision...