La TVA, les douanes et la facturation électronique continuent d’occuper l’actualité fiscale tant au niveau français qu’international. L’actualité dans ces domaines reste très riche et démontre la volonté des Etats de mener et d’accélérer la mise en œuvre d’importantes réformes structurantes dans ces trois domaines.
Les sujets présentés dans le présent cahier s’articulent autour de quatre axes : la digitalisation et la transmission en temps réel des données de facturation et transactionnelles, le renforcement de l’obligation de transparence douanière et des évolutions futures en matière de compliance TVA, la mise en œuvre de certaines mesures de simplification ou incitatives TVA pour les entreprises et l’émergence de nouvelles problématiques douanières et TVA à suivre.
Il nous a semblé opportun de faire un état des lieux de ces principaux changements actuels et attendus qui doivent être pris en compte par les entreprises et qui constitueront des points majeurs d’attention pour leurs directions financières, fiscales, informations et logistiques.
Digitalisation : un point sur la réforme de la facturation électronique en France et les évolutions futures liées à la Directive VIDA
La date du 1er septembre 2026 pour la mise en œuvre en France de la réforme de la facturation électronique (e-invoicing et e-reporting) pour les Grandes Entreprises (GE) et les Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI) approche à grand pas. Il ne restera bientôt plus qu’un an pour que ces entreprises achèvent leurs projets d’intégration de ces nouvelles règles de facturation. Cette période qui s’ouvre aux entreprises sera également riche en apports règlementaires et commentaires pratiques sur de nombreux sujets encore ouverts que ce soit au niveau technique et des systèmes d’information ou au niveau TVA pour les cas d’usages identifiés ou restant encore à identifier.
La Directive VIDA adoptée le 11 mars 2025 prévoit dans son « Pilier 1 » des mesures favorisant la généralisation et l’harmonisation de la facturation électronique entre les Etats membres et la création de systèmes de déclaration électronique (DRR – « Digital Reporting Requirements ») afin de faciliter l’échange d’informations fiscales entre ces Etats. Ces mesures se traduiront par une plus grande transparence, une meilleure efficacité et une réduction de la fraude TVA. Les opérateurs (et les administrations) doivent désormais s’assurer de l’articulation (et des potentielles évolutions) des solutions mises en œuvre au niveau national avec ces nouvelles obligations qui entreront en vigueur le 1er janvier 2030.
Conformité : une obligation de transparence accrue en matière douanière et des évolutions de compliance TVA à anticiper
En matière douanière, la multiplication des règlementations environnementales et sociétales – ESG (taxe carbone aux frontières, déforestation, travail des mineurs, etc.) impose aux entreprises de mapper les différentes obligations déclaratives potentiellement applicables à leurs activités et de mettre en place des procédures de contrôle interne visant à répondre à ces obligations et à démontrer leur niveau de diligence. L’une des difficultés majeure commune à ces règlementations est le niveau de connaissance suffisant des partenaires dans la chaîne d’approvisionnement et la capacité à collecter et traiter les données nécessaires.
En matière d’obligations déclaratives TVA, il convient d’ores et déjà d’appréhender les nouvelles dispositions de la Directive VIDA (« Pilier 3 ») visant essentiellement à limiter les obligations d’immatriculation à la TVA dans l’Union européenne grâce à diverses mesures comme la généralisation de l’autoliquidation de la TVA pour les opérations domestiques B2B.
Simplification et sécurité juridique : deux exemples au travers de l’évolution récente des effets de l’assujetti unique (groupe TVA) et des modalités de régularisation d’une TVA indument facturée
L’introduction de l’assujetti unique en France au 1er janvier 2023 offre aux opérateurs français la possibilité de limiter la rémanence de la TVA au sein d’un groupe comprenant des opérateurs faiblement récupérateurs de la TVA. Les groupes ayant opté pour ce régime dès 2023 et arrivant à la fin de leur 3ème année d’option cette année doivent tirer un bilan sur ce régime et s’interroger sur son maintien ou son périmètre. Ce régime concerne toutes les entreprises mais il a été essentiellement mis en œuvre dans le secteur bancaire, financier et assuranciel compte tenu des gains importants en matière de TVA comparés à l’impact sur le niveau de redevabilité en matière de taxe sur les salaires. Un nouveau dispositif a été mis en place à compter du 1er janvier 2025 afin de limiter l’assujettissement à la taxe sur les salaires et ainsi d’ouvrir ce régime à un plus large public incluant des opérateurs ayant un droit à récupération à la TVA intégral.
Une évolution notable en faveur du respect du principe de neutralité de la TVA et de la sécurité juridique doit être soulignée cette année en matière de TVA facturée à tort. La doctrine fiscale permet désormais, sous certaines conditions, au fournisseur de rembourser à son client la TVA indûment facturée sans risque de prescription pour ensuite la récupérer auprès de son centre des impôts. De même, un client qui serait dans l’impossibilité de récupérer auprès de son fournisseur la TVA indûment facturée par ce dernier, aurait désormais la possibilité d’agir directement auprès de l’administration fiscale pour en obtenir la restitution. Toutefois, ces solutions doctrinales ne couvrent pas tous les cas et la prudence reste de mise avant de s’engager dans une régularisation de la TVA.
Incertitudes : une sélection de sujets TVA et douane actuels dont l’évolution et les effets doivent être surveillés
La liste est longue et une sélection s’imposait soit en raison de l’actualité forte du moment ou de la portée de certaines décisions jurisprudentielles.
La guerre commerciale douanière engagée par l’administration Trump est un sujet de préoccupation majeur actuel. Au-delà des actions immédiates à mettre en œuvre pour limiter l’augmentation des droits de douanes avec les Etats-Unis, cette guerre démontre la nécessité impérieuse pour les entreprises de mieux maitriser les droits de douanes et de définir une stratégie douanière efficace et agile.
Les dernières évolutions doctrinales concernant la TVA d’importation constituent un acte fondateur important visant à clarifier et à refondre le régime TVA des importations. A cette occasion, l’administration fiscale a précisé que la TVA d’importation ne peut être récupérée que par le propriétaire du bien importé. Cette condition de propriété introduit une complexité supplémentaire dans la gestion de la TVA d’importation qui ne suit pas nécessairement les règles posées en matière douanière.
La question de l’incidence de la politique de prix de transfert (y compris ses ajustements) en matière de TVA risque d’évoluer cette année compte tenu des nombreuses questions préjudicielles pendantes auprès de la CJUE et dont les décisions sont attendues pour cette année.
La question du « bénéficiaire effectif » en TVA semble susciter un regain d’intérêt auprès des juridictions. Ce concept basé sur la réalité économique des opérations pourrait prendre une place prépondérante dans le traitement TVA de certaines opérations, ce qui n’est pas sans susciter de nombreuses interrogations.
En synthèse, cette diversité des sujets démontre que tous les opérateurs seront nécessairement impactés et qu’il est indispensable de s’y préparer dans un contexte qui devient de plus en plus instable et incertain.
1. Directive 2025/516 du 11 mars 2025 modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne les règles en matière de TVA adaptées à l’ère numérique.
2. Responsabilités Environnementale, Sociale et Gouvernance .