Les émergents fragilisés
La diminution progressive, par la banque centrale américaine, de son programme d’achats mensuels d’obligations joue certainement un rôle de catalyseur dans la débandade récente des taux de change des devises émergentes. Mais il ne s’agit pas d’un impact mécanique. Le changement annoncé de la politique monétaire américaine modifie l’évaluation des risques que font les investisseurs. Les faiblesses de certaines économies, qui avaient enregistré des entrées de capitaux d’investisseurs à la recherche de rendements qu’ils ne trouvaient plus dans les économies développées, ont refait surface. Les économies qui affichent des déficits courants importants, une inflation jugée trop élevée et où l’activité est moins dynamique que par le passé cumulent les éléments négatifs et subissent un reflux des capitaux arrivés ces dernières années.
Le mouvement est accentué quand existe un risque politique. Loin de permettre un rebond de l’activité, la forte dépréciation des devises se traduit par un renchérissement des importations qui provoque une augmentation supplémentaire du déficit extérieur. Cette hausse des prix des importations a aussi un impact négatif sur les coûts de production des entreprises, la plupart des pays victimes de ces mouvements étant importateurs nets de matières premières énergétiques, et accentue les tensions inflationnistes. Face à ces mouvements, les banques centrales sont tentées de durcir leurs politiques monétaires, parfois de manière drastique, en Turquie par exemple. Il en résulte un durcissement des conditions de financement qui vient renforcer l’impact récessif des sorties de capitaux.
Jean-Louis Mourier occupe la fonction d’économiste chez Aurel BGC, société de courtage qu’il a rejoint en 1998. Titulaire d’un DEA d’économie internationale obtenu à Grenoble, Jean-Louis Mourier exerce la profession d’économiste dans des institutions financières depuis plus de 20 ans. D’abord au sein du groupe Louis-Dreyfus, puis chez Aurel, il suit la conjoncture des pays de l’OCDE, et plus particulièrement de la zone euro, ainsi que de quelques économies émergentes. Il s’intéresse notamment aux politiques monétaires et aux mouvements internationaux de capitaux.