Ressources humaines

Fintechs : Les recrutements explosent !

Publié le 29 octobre 2021 à 11h11

Thomas Feat    Temps de lecture 7 minutes

Le nombre de salariés des fintechs pourrait passer de 26 000 aujourd’hui à 40 000 d’ici la fin de l’année prochaine. Ces jeunes pousses, dont la taille ne cesse de croître, recherchent des profils de plus en plus diversifiés, dans des domaines comme l’informatique, la vente, le droit bancaire et la finance d’entreprise.

En cette année 2021, la Fintech française connaît un développement sans précédent. Depuis janvier, l’écosystème a levé 2,1 milliards d’euros, un montant en augmentation de 120 % sur un an, selon un panorama de France FinTech et Bpifrance publié en octobre dernier. Le secteur compte aujourd’hui plus de 730 entreprises évoluant dans les nouveaux services bancaires, l’assurance, la conformité réglementaire, les placements patrimoniaux, les financements et les services opérationnels, soit trois fois plus qu’en 2018. Parmi celles-ci, 7 licornes – Alan, Shift, Ivalua, Ledger, Dataiku, Kyriba et Swile – sont aujourd’hui valorisées plus d’un milliard d’euros. Corollaire de cette expansion, les fintechs multiplient les recrutements : si 8 000 salariés travaillaient dans ces jeunes pousses en 2018, leur nombre atteignait 26 000 à la fin du premier semestre 2021, et pourraient atteindre 40 000 d’ici la fin de l’année prochaine, selon un sondage réalisé dernièrement par France FinTech auprès de ses 250 adhérents. « Cette augmentation en volume s’accompagne d’une diversification des profils recherchés qui transcende largement les spécialités technologiques », indique Alain Clot, président de l’association.

Bien sûr, les fintechs, entreprises « digital native » par essence, plébiscitent plus que jamais ces profils. Les développeurs, codeurs, « data scientists », statisticiens et autres « chief technical officers » constituent aujourd’hui, en moyenne, près des deux tiers de leurs forces vives, et pourraient compter pour un tiers de leurs embauches au cours des quatorze prochains mois, selon France FinTech. La demande est telle que les jeunes pousses, qui se livrent une compétition féroce, peinent à pourvoir tous leurs postes. « La France forme d’excellents codeurs, data scientists et ingénieurs, mais leur nombre est encore très insuffisant en dépit de la multiplication des formations ! », déplore Alain Clot. Heureusement pour elles, de plus en plus de start-up disposent, grâce à leurs tours de table, des ressources financières nécessaires à la constitution de packages de rémunération attractifs. « Le salaire fixe moyen d’un développeur ou d’un codeur avec deux ou trois ans d’expérience peut, dans les fintechs en phase d’industrialisation, facilement dépasser les 60 000 euros brut, note Adrien Choquet, gérant au sein du cabinet de conseil en fusions-acquisitions Gimar & Co. Celui-ci est généralement complété par des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE) ou des bons de souscription d’actions (BSA) qui ont pour avantage d’inciter les talents à s’engager durablement dans les structures. »

Une internationalisation croissante

Dans le même temps, les fintechs tricolores étoffent leurs fonctions dites « opérationnelles ». Elles recrutent notamment des commerciaux ou « business developers » dont la mission consiste à trouver de nouveaux débouchés au sein du monde bancaire, assurantiel et corporate. « Plus des deux tiers des fintechs tricolores évoluent aujourd’hui dans le BtoB », rappelle Maximillien Nayaradou, directeur général du pôle Finance Innovation. Parmi ces commerciaux, les « responsables partenariats » se voient confier des prérogatives bien spécifiques. « Ils sont plus particulièrement chargés d’identifier les prospects et les interlocuteurs idoines au sein des organisations ciblées », détaille Alain Clot.

D’ici à la fin de l’année prochaine, ces profils pourraient représenter environ 15 % des recrutements de l’écosystème, selon France FinTech. « L’internationalisation d’un nombre croissant de start-up françaises, favorisée par l’amplification des tours de table, dope les embauches de commerciaux », note Adrien Choquet. Après avoir levé 200 millions d’euros il y a quelques semaines, Swile, spécialiste de la dématérialisation des titres-restaurants et des titres-cadeaux d’entreprise, projette ainsi de prendre pied en Amérique du Sud dans les deux ans et d’embaucher plus d’une centaine de « business developers » français et locaux.

Des DAF présents très en amont

Experts du marketing, de la communication, du design produit, de l’expérience utilisateurs (ou « user experience ») et de la prévention des risques figurent également parmi les profils « opérationnels » les plus recherchés par l’écosystème. Tous sont concernés par une tendance de fonds. « De plus en plus de candidats à ces postes sont issus du monde financier traditionnel, relève Maximilien Nayaradou. Ces professionnels recherchent un environnement de travail plus flexible et davantage tourné vers l’innovation que celui dans lequel ils évoluaient jusqu’alors. » De leur côté, les recruteurs sont facilement séduits par leurs compétences et par leur connaissance des rouages de la finance conventionnelle. « Il n’est plus du tout rare de voir, par exemple, des fintechs actives dans le domaine du financement recruter des analystes crédit ou des experts du scoring bancaire passés par de grands établissements et capables de manipuler des outils d’évaluation inspirés de ceux de ces acteurs historiques », témoigne Adrien Choquet.

Pour leur part, les regtechs, fintechs qui interviennent auprès des institutions financières pour faciliter leur processus de mise en conformité, ciblent plus spécifiquement des experts du droit. Ces spécialistes comptent aussi parmi les profils les plus recherchés par les fintechs détentrices ou qui cherchent à se doter d’un agrément délivré par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et/ou l’Autorité des marchés financiers (AMF). « Ces collaborateurs sont appelés à superviser le processus d’obtention de l’agrément et à assurer le suivi des procédures de contrôle du régulateur », détaille Alain Clot. Si ces missions sont encore confiées la plupart du temps à des cabinets d’avocats, un nombre croissant d’entreprises choisissent d’internaliser ces tâches par souci d’économie.

Une extrême polyvalence

Dans ce contexte effervescent, les fonctions finance feraient presque pâle figure. Selon France FinTech, elles pourraient être concernées par moins de 2 % des recrutements anticipés par les fintechs d’ici fin 2022. La réalité est en fait plus nuancée. « La constitution de la direction financière et/ou la nomination d’un DAF surviennent généralement très tôt dans la vie des fintechs – comme des start-up – puisqu’elles coïncident avec leurs premières levées de capital-risque. Le ou les financiers vont être chargés de superviser le financement, puis de produire les reportings et les indicateurs de performance requis par les investisseurs, indique Alain Clot. Par la suite, il est normal que l’accroissement des fonctions finance cède provisoirement le pas au développement technologique ou commercial des jeunes pousses. » Par conséquent, exercer le métier de financier dans une fintech est souvent loin d’être une sinécure : la taille réduite des effectifs appelle une extrême polyvalence des équipes dans un contexte d’intense accélération. 

Trois segments très porteurs de la Fintech

Les financements, la prévention des risques juridiques et financiers, et l’accompagnement des directions financières sont les trois segments de la Fintech française qui concentraient le plus d’emplois à la mi-2021, selon France FinTech. Près de 17 000 salariés travaillaient dans l’une des 400 entreprises évoluant dans ces trois disciplines. Ces entreprises, qui ont levé près de 1,4 milliard d’euros depuis janvier, sont susceptibles de connaître un développement très fort dans les prochaines années.

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