Après un léger repli ces dernières années, les embauches au sein des cabinets d’audit et d’expertise comptable reprennent en 2015. Une tendance qui s’explique par des créations de postes, en particulier au sein des fonctions opérationnelles.
Plus des trois-quarts (77 %) des cabinets d’audit et d’expertise comptable ont renforcé leurs effectifs en France entre juin 2014 et mai 2015, un chiffre qui n’avait pas été observé depuis 2012. C’est ce qui ressort d’une étude publiée par le cabinet de recrutement Hays, dont les éditions précédentes notaient un pic des embauches en 2011-2012 à 79 %, puis une légère diminution à 76 % en 2012-2013 et à 74 % en 2013-2014. «Il s’agit d’un marché qui recrute toujours énormément sur l’ensemble du territoire», observe Béatrice Boiteau, directrice adjointe de Hays Audit Expertise Comptable. Cette année, le dynamisme est davantage marqué dans les villes de Paris, Dijon et Nice.
Comme par le passé, les recrutements s’effectuent selon l’étude à la suite d’un départ en retraite dans 21 % des cas et d’une démission dans 66 %. La part des démissions est stable depuis plusieurs années. «Le turnover reste stable, mais conséquent, dans la profession comptable, constate Béatrice Boiteau. Les salariés en poste demeurent souvent en veille sur le marché du travail.» Parmi ceux qui scrutent les offres d’emploi, 78 % cherchent à améliorer leur rémunération. Les cabinets ont en effet eu tendance à offrir un même niveau de rémunération ces dernières années (voir encadré).
Des salariés plus impliqués
- L’implication des salariés exerçant au sein des cabinets d’audit et d’expertise comptable a bondi cette année, selon l’étude Hays. Au cours de l’année 2014-2015, 91 % des salariés se sont dits engagés dans leur travail, contre 70 % en 2014.
- Cette tendance est particulièrement marquée dans les structures de plus de 50 personnes. D’après le cabinet de recrutement, les critères de motivation restent les mêmes. En premier lieu, les salariés mentionnent le poste et l’intérêt de la mission (68 %). Viennent ensuite l’ambiance au sein de l’équipe et le climat social (58 %). Enfin, les salariés prennent en considération l’évolution de leur statut ou de leur salaire (58 %) et l’encadrement par le manager ainsi que la reconnaissance du travail effectué (49 %).
- Par rapport à l’année passée, le mode de management a perdu de l’importance en faveur de l’atmosphère au sein du cabinet. «Cela marque une réelle prise de conscience de la part des employeurs de l’importance de favoriser le climat social», relève Béatrice Boiteau, directrice adjointe Hays Audit Expertise Comptable.
Les cabinets se regroupent
En revanche, la nouveauté notable de cette année concerne l’augmentation des créations de postes. Ces dernières ont représenté 55 % des offres d’emplois dans les cabinets, alors qu’elles avaient diminué sur la période précédente, passant de 62 % en 2012-2013 à 52 % en 2013-2014. «La structuration du marché évolue, explique Béatrice Boiteau. Les cabinets se regroupent et doivent recruter davantage.»Ce phénomène de concentration s’explique d’abord par la volonté des clients de bénéficier d’un service complet. Pour être concurrentiels, les cabinets doivent alors se diversifier. «Agrandir la taille des cabinets permet de mutualiser les compétences pour répondre à la demande de la clientèle», poursuit Béatrice Boiteau. Les rapprochements sont en outre favorisés par le «papy-boom» qui conduit les dirigeants de cabinet à vendre leur structure lors de leur départ en retraite.
Les opérationnels sont prisés
Cette évolution structurelle a pour effet d’accroître la demande de profils opérationnels alimentant les fonctions supports.Assistants, informaticiens et commerciaux sont notamment prisés dans les régions du Sud-Est où ils représentent 29 % des embauches, du Nord-Ouest (26 %), ainsi qu’en Ile-de-France (24 %). Une tendance qui s’explique d’abord par le souhait des cabinets de réajuster leurs effectifs. «Les années précédentes, les recrutements concernaient davantage les fonctions d’encadrement, un rééquilibrage semble s’être opéré cette année en faveur des postes opérationnels», relève Béatrice Boiteau. De plus, les cabinets veulent développer leur stratégie commerciale et marketing : 77 % des structures de plus de 50 salariés ont ainsi étoffé leurs équipes de profils commerciaux et marketing confirmés. Pour des raisons de coûts, les plus petits cabinets se tournent davantage vers des candidats juniors, jeunes diplômés qui bénéficient d’une première expérience en stage, mais qui se montrent tout autant impliqués (voir encadré).
Des rémunérations relativement stables
«De manière générale, les rémunérations restent stables pour les métiers de l’audit et de l’expertise comptable», observe Béatrice Boiteau, directrice adjointe Hays Audit Expertise Comptable. Leur niveau progresse uniquement dans les régions où les volumes de poste augmentent, notamment à Paris, Dijon et Nice.
- La rémunération fixe de la fonction audit s’établit entre 19 000 euros par an pour les juniors et 120 000 euros par an pour les profils les plus confirmés. Pour la fonction de l’expertise comptable (salariée), elle est comprise entre 17 000 et 110 000 euros par an. Cette fourchette ne comprend pas les rémunérations des experts-comptables associés qui peuvent s’élever à plus du double de celles des salariés.
- L’importance de la rémunération va de pair avec la taille du cabinet. Elle varie également en fonction du statut et du diplôme, sauf pour les experts-comptables en Ile-de-France où les cabinets se réfèrent davantage à l’expérience et aux compétences afin d’en fixer le montant. Les fourchettes de rémunérations les plus basses s’observent dans le Sud-Ouest et dans le Nord-Est.
- La part variable reste elle aussi relativement stable, malgré une légère diminution de la proportion d’employeurs qui l’accordent (38 % contre 41 % l’année dernière). Parmi eux, près de la moitié (49 %) rémunèrent leurs salariés avec une part variable comprise entre 5 % et 10 % du salaire. Cette pratique est particulièrement répandue dans la région du Sud-Est. La part variable est par ailleurs de plus en plus liée au développement commercial du cabinet et se compose notamment, dans plus de la moitié des cas (54 %), d’une prime liée à la conquête de nouveaux clients.
Autre profil recherché : les candidats ayant des compétences en gestion. En effet, de nouveaux métiers apparaissent au sein des cabinets dans le but d’assurer les résultats prévisionnels d’activité. Cette évolution va de pair avec l’exigence accrue des clients de bénéficier de services étendus. Les employeurs recrutent ainsi des experts-comptables dotés d’une expérience de deux à trois ans (appelés collaborateurs en gestion ou conseillers en gestion) dont la mission consiste à réaliser des reportings et des tableaux prévisionnels. Pour cette raison, du côté des candidats auditeurs et experts-comptables, «l’université reste la voie royale, mais les recruteurs apprécient les profils émanant d’écoles de commerce notamment, indique Béatrice Boiteau. Auparavant, seuls les big four (Ernst & Young, PwC, KPMG et Deloitte) recherchaient ce type de profils, mais aujourd’hui, les cabinets “indépendants” s’y ouvrent également. La profession est en pleine mutation, tous les cabinets doivent donc adapter leurs ressources humaines.» Une tendance qui devrait se prolonger en 2016.