Les Mooc, plateformes numériques regroupant des vidéos de cours en ligne, et les serious games, exercices de mises en situation réelles, intègrent désormais le cursus financier des grandes écoles de commerce. Une nouvelle manière de former des étudiants ou des salariés qui rencontre un vif succès.
Lancé en janvier, «Lever des Fonds pour ma Startup» est le nouveau Mooc (Massive Open Online Course) spécialement créé par Grenoble Ecole de Management pour les entrepreneurs et les start-up à la recherche de capitaux, mais aussi pour les étudiants en gestion et management. Cette école n’est pas la première à s’emparer du phénomène des cours interactifs. L’arrivée de ce dispositif pédagogique pour former des étudiants et des salariés à la finance prend de l’ampleur depuis quelques années. HEC, l’Edhec Business School, l’ESCP Europe, par exemple, dispensent déjà des Mooc et des serious games en finance.
La théorie par les Mooc
Les Mooc sont en effet jugés comme très appropriés à l’apprentissage de la finance de leurs étudiants. Toutefois, certaines écoles n’hésitent pas à ouvrir leur formation numérique à des professionnels venus de la banque par exemple. C’est le cas de l’Edhec Business School qui, depuis 2016, propose le «Global Financing Solutions», sponsorisé par l’un des leaders des services financiers en Europe, la Société Générale. Ce Mooc, d’une durée de six semaines, s’adresse aussi bien aux étudiants qu’aux collaborateurs de la banque en quête de formations pratiques, sur la base du volontariat. Il combine enseignement classique et expertise professionnelle : les concepts sont expliqués par le professeur puis illustrés par des cas concrets présentés par des dirigeants de la Société Générale. «Cet outil est très intéressant car il est complémentaire du cours en amphithéâtre», se félicite Abraham Lioui, directeur du département finance de l’Edhec et responsable du Mooc. Chaque semaine de formation se décompose en cinq vidéos sur un thème précis (le processus de syndication, les marchés de capitaux, la titrisation…) et est sanctionnée par un quiz permettant à l’apprenant de faire un point sur ses connaissances. Un forum d’échanges, une masterclass avec le professeur responsable du Mooc sont également au programme. Cette formation connaît un succès grandissant. «Le programme comptait près de 800 inscrits la première année, observe Abraham Lioui. Ils étaient 1 311 en 2017 : 1 167 salariés de la Société Générale et 144 étudiants de l’Edhec.»
En revanche, d’autres grandes écoles ont décidé de ne s’adresser qu’aux professionnels. C’est le cas d’HEC qui, depuis 2015, forme près de 2 200 financiers en poste ou salariés souhaitant évoluer dans le monde de la finance, grâce à un Mooc. Ce module de cinq mois (vidéos, forum, examen) donne droit à un diplôme avec une certification HEC à la clé. Il coûte environ 2 100 € à chaque participant. «L’idée de proposer cette formation ne vient pas des entreprises, car celles-ci ne souhaitent pas imposer un temps aussi long de remise à niveau à leurs collaborateurs, explique Pascal Quiry, professeur de finance à HEC. 90 % des participants s’inscrivent dans une démarche individuelle et donc motivée.»
Par ailleurs, le Centre de formation des professions bancaires (CFPB) a, lui aussi, mis en place un Mooc en ligne, en 2015, avec ses partenaires bancaires (Axa banque, LCL, BNP Paribas…). Celui-ci est destiné à tous les salariés des banques avec une priorité pour ceux du front office et de la banque de détail. «Cette formation attire aussi les collaborateurs des fonctions support comme l’informatique, le marketing, les ressources humaines, car elle leur permet de mieux comprendre le fonctionnement d’une banque et de son environnement», indique Gilles Macchia, directeur de recherche et développement du CFPB.
La mise en pratique par les serious games
Si les Mooc dispensent un enseignement théorique, les grandes écoles n’hésitent plus à recourir également aux serious games pour leurs exercices d’immersion dans le milieu de la finance (physique ou réalité augmentée) destinés à former les futurs professionnels.
L’ESCP Europe utilise ainsi ce dispositif pédagogique, depuis six ans, pour ses cours de Master. Il s’agit pour les étudiants d’une mise en situation physique qui fait partie du contrôle continu. L’école leur demande de faire une présentation en analysant des documents, la concurrence, en répondant à un appel d'offres. Les étudiants peuvent être placés en situation de gestion de crise. Dans ce cas, le serious game est un moyen de vérifier la bonne assimilation de la théorie à travers un cas pratique.«Souvent, des professionnels de la banque participent aux cours de trading, explique Cécile Kharoubi, professeur au département finance d’ESCP Europe. Cet exercice leur apprend aussi à se vendre pour de futurs entretiens d’embauche, les étudiants apprécient tout particulièrement ce type d’exercice.»
De son côté, le CFPB a également mis en place, à la rentrée dernière, un serious game pour les enseignements des formations en alternance. Le module «Pass Omnicanal», constitué de deux jours, est intégré dans les formations en alternance diplômantes dispensées par la CFPB. Ce serious game a pour but de former les conseillers commerciaux à la maîtrise de l’espace de vente (physique, digital, parcours clients). Le premier jour est une observation sur le terrain. «Nous proposons à nos apprenants des visites de nouveaux lieux de vente avec des casques de réalité virtuelle», indique Gilles Macchia. Le deuxième jour est consacré au serious game en lui-même. «Nous leur demandons de se projeter, d’accueillir et de s’entretenir avec des clients…, ajoute Gilles Macchia. L’enjeu est de les plonger dans un univers réaliste et d’évaluer leur comportement.»
Modernes, ces formations à la finance séduisent de plus en plus les étudiants de tous âges. Pour autant, tous sont bien d’accord : elles ne peuvent en aucun cas se substituer aux cours d’amphithéâtre.
Les serious games, nouvel outil de profilage client
Pour mieux cerner le comportement de leurs clients, certaines banques ou cabinets de gestion sont, désormais, très friands des nouvelles technologies et ont recours à des serious games pour remplacer les traditionnels questionnaires papier. Ces outils sont utilisés pour tester le goût du risque des emprunteurs, la connaissance financière des clients ou proposer du coaching aux équipes commerciales. «Pour une banque, nous proposons une solution qui, avec une trentaine de questions, analyse par exemple l’aversion d’un client pour la perte, son appétit pour le gain, explique Julien Revelle, co-fondateur de Neuroprofiler, fintech spécialisée dans le profilage du risque. Cela permet aux gestionnaires de déterminer un investissement raisonnable et de guider les banques avec leurs clients.»