Le paysage énergétique évolue vite, offrant défis et opportunités. Lucie Vannoye, analyste chez Mirova, explore ces enjeux.
Le prix moyen de production d’électricité ne devrait pas augmenter davantage à long terme, mais il deviendra sans aucun doute plus volatile. Si les gouvernements veulent s'assurer que cette volatilité ne menace pas le développement des énergies renouvelables, ils doivent immédiatement créer un marché qui offre aux producteurs d’électricité plus de visibilité ainsi que des infrastructures de réseau et de stockage plus robustes.
Le secteur de l’énergie n’est pas habitué à une volatilité aussi élevée et s'est retrouvé sous les projecteurs ces derniers mois. L'écart de crédit du secteur européen est revenu à ses niveaux de crise Covid en 2022 pour plusieurs raisons : le risque de pénurie de gaz déclenché par la guerre en Ukraine, les inquiétudes selon lesquelles les rendements des projets d’énergie renouvelable seraient compromis par des taux d'intérêt plus élevés et l'incertitude réglementaire exacerbée par l'intervention politique. L'écart s'est ensuite rétréci à nouveau et a surperformé de manière significative durant l'hiver 2023, avant de s'élargir à nouveau durant l'été 2023 après que les projets offshores aux États-Unis ont commencé à être retardés.
Maintenant, avec le cycle de baisse des taux d'intérêt ayant débuté en Europe et des réserves de gaz pleines, nous profitons de ce répit pour prendre du recul et examiner le secteur.
Transition bien entamée pour le secteur de l’électricité
Les entreprises opérant sur le marché de l’électricité ont été parmi les premières à être perturbées par la transition énergétique et le secteur a réalisé des progrès considérables au cours des dix dernières années. En 2023, 44 % de l’électricité produite dans l’Union européenne provenait des énergies renouvelables, y compris l’hydroélectricité, et le segment éolien a produit plus d’électricité que le segment gaz pour la première fois (1). Néanmoins, la décarbonisation du secteur reste l’un des éléments centraux d’un scénario à 2 degrés, car il est responsable d’environ un quart des gaz à effet de serre du continent (2).
Il est donc essentiel que son processus de décarbonisation s'accélère. Si les objectifs énoncés dans le plan RepowerEU (3) doivent être atteints, les énergies renouvelables doivent représenter une part significativement plus élevée de l'électricité produite dans l'Union européenne d'ici 2030. Il semble d'autant plus essentiel que l'élan s'accélère, car il devra suivre l'augmentation de la demande d’électricité, qui a peut-être légèrement diminué en Europe depuis le début du siècle, mais qui devrait rebondir dans les années à venir. Ce sujet est devenu un sujet brûlant aux États-Unis ces derniers mois : le pays s'inquiète de la quantité d'énergie consommée par ses centres de données, dont le nombre augmente à mesure que l'intelligence artificielle s'impose dans la société – il convient de noter qu'une recherche ChatGPT consommerait 10 fois plus d'électricité qu'une recherche Google (4).
1 Source: https://ember-climate.org/insights/research/european-electricity-review-2024/
2 Source: https://www.eea.europa.eu/signals-archived/signals-2022/infographics/what-are-the-sources-of
3 RepowerEU : le plan de l'Union européenne visant à rendre l'Europe moins dépendante des combustibles fossiles et à accélérer la transition vers une énergie verte.
4 Source: Le Monde, mai 2024.