(AOF) - L'augmentation de capital de 600 millions d'euros lancée par la Société de la Tour Eiffel, qui se clôt le 10 janvier "se déroule au mépris des intérêts des minoritaires", affirme un collectif représenté par MAB Finances dans un communiqué diffusé hier. Il dénonce une opération "lancée dans la précipitation", alors que "rien dans la communication financière de la société ne laissait prévoir la dégradation soudaine et d'une telle ampleur de sa situation financière". Christel Zordan, directrice générale de la société, et Franck Lutz, CFA, répondent à cette mise en cause dans un entretien à AOF.
Christel Zordan, vous êtes DG de la Société de la Tour Eiffel. Que répondez-vous à la mise en cause de l'augmentation de capital lancée le 16 décembre par un collectif d'actionnaires minoritaires ?
L'augmentation de capital lancée le 18 décembre 2024 était indispensable face à la suspension des dividendes et l'échéance de nos instruments financiers.
Cette situation critique, évoquée depuis plus de 18 mois et mentionnée plus explicitement en juillet, imposait une réaction adaptée pour garantir la continuité d'exploitation.
Ce collectif d'actionnaires est constitué de grands professionnels de l'immobilier comme Maryse Aulagnon. Ils sont pleinement conscients de ces enjeux.
Frank Lutz, vous êtes DAF de la Société. Pouvez-vous nous parler du calibrage de l'opération ?
L'opération de 600 millions d'euros comporte 2 volets : Le premier de 420 millions d'euros vise à assurer la continuité d'exploitation de la société en réduisant la dette et en assurant un ratio ICR (Excédent brut d'exploitation sur frais financiers) supérieur à 2. Sans cela les 800 millions d'euros de dette deviendraient exigible.
Avec l'échéance de nos swaps à -0,5% en 2024, nos frais financiers explosent conduisant à un ICR largement inférieur à 2, reflet d'un endettement inadapté.
Sur la base des chiffres du premier semestre 2024, cette opération permettrait d'atteindre un ICR à 2,4x. Un niveau largement inférieur aux standards du secteur (4x à 6x), mais suffisant pour retrouver de la souplesse à moyen terme.
Le second volet vise à rembourser le TSDI (Titres subordonnés à durée indéterminée) 2020 de 180 millions d'euros. Sans cela, son coupon passerait de 4,5 % à 9,5 % alors qu'en parallèle les actionnaires ne toucheraient aucun dividende à court terme. Rembourser ce TSDI réaligne les intérêts de tous.
Il est enfin important de souligner que le groupe SMABTP garantit l'opération à 75 %.
Certains sont surpris de la rapidité d'exécution de cette opération dont les caractéristiques ne sont connues que depuis le 16 décembre. Quelle a été la genèse de l'opération?
Le besoin était connu depuis mars 2023 et évoqué à chaque réunion d'analystes. Ce collectif d'actionnaires était particulièrement vigilant à ce propos. Mais il est impossible de communiquer au marché tant que les éléments précis ne sont pas arrêtés par le Conseil.
Le montant de 600 millions d'euros est connu depuis le 6 novembre. Il a été suivi par une communication sur nos perspectives 2024 afin que tous les actionnaires bénéficient du même niveau d'information.
Les modalités ont été définies par le Conseil qui a suivi l'AGE. Avec un prix ne pouvant ni s'éloigner du cours de bourse ni être inférieur au nominal, tout était disponibles depuis plusieurs semaines.
Pourquoi n'y a-t-il pas eu de rachat des minoritaires ?
Une offre publique de retrait aurait mobilisé 300 millions d'euros passant d'une poche à une autre sans résoudre le problème d'endettement.