Par un arrêt du 12 mars 2025 (n° 24/07634), la cour d’appel de Paris prononce l’annulation d’une ordonnance du juge des libertés et de la détention (JLD) autorisant, à la demande de l’administration fiscale, sur le fondement de l’article L. 16 B du Livre des procédures fiscales (LPF), la visite domiciliaire de locaux occupés en France par une société de droit britannique, après avoir constaté que la société appelante et l’administration fiscale elle-même convenaient à l’absence de présomptions d’agissements frauduleux au vu des éléments produits à l’instance et soumis à la contradiction.
Au-delà de son sens, favorable au contribuable, rare en la matière, la présente décision questionne sur la dialectique de la preuve et, plus largement, sur les conditions d’exercice du droit de visite et de saisie par l’administration fiscale.
1. Droit de visite et de saisie de l’administration fiscale : une prérogative d’investigation exorbitante du droit commun
Introduite en droit interne par une loi du 29 décembre 1984, la procédure de visite et de saisie permet aux agents de l’administration fiscale, sur autorisation du JLD, de réaliser des opérations de visite et de saisie en tous lieux, même privés, lorsque le juge estime qu’il existe des présomptions suffisantes qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement de ses impôts (impôts sur le revenu, sur les sociétés, TVA, etc.).
Parmi les moyens d’investigation de l’administration fiscale, cette procédure (prévue à l’article L. 16 B du LPF) constitue un pouvoir d’investigation exorbitant du droit commun. Aussi, parce qu’elle porte atteinte aux libertés publiques individuelles (ainsi le droit au respect de la vie privée protégée par l’article 8 de la CEDH), la visite domiciliaire est placée sous le contrôle effectif de l’autorité judiciaire, conformément à l’article 66 de la Constitution, qui dispose que « l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».
Cette intervention de l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, est d’autant plus importante que cette dernière est le seul contradicteur à la demande d’autorisation formulée par l’administration fiscale.