L’année 2024 a été compliquée pour les start-up tricolores. Outre des levées de fonds en baisse, la French tech a également enregistré davantage de défaillances l’année dernière selon un baromètre réalisé par ScaleX Invest qui développe des outils de scoring de risques et de valorisation pour les banquiers et investisseurs. Ainsi, selon l’étude qui s’intéresse aux jeunes pousses ayant réalisé au moins une série A, soit un minimum de 5 millions d’euros levés, 64 nouvelles entreprises étaient en difficulté en 2024 contre 43 fin 2023. Dans le détail, au sein de l’échantillon composé de près de 1 500 entreprises créées après 2005 et ayant levé au moins 5 millions d’euros, 20 sociétés ont été rachetées durant une procédure d’insolvabilité, dont 7 en 2024, 41 sont toujours engagées dans une telle procédure, dont 29 entrées en procédure en 2024, et 94 ont fait faillite (28 en 2024). Parmi les secteurs les plus impactés figurent le « lifestyle », l’agritech et la proptech. En revanche, les insurtechs, les entreprises spécialisées dans la supply chain et les cleantechs semblent mieux se porter.
Autre fait marquant, pour la première fois, le nombre de défaillances post série A est supérieur à celui des entreprises ayant réalisé de nouvelles séries A. « En 2024, notre indice devient négatif avec un score de – 1, indique Sébastien Paillet, CEO de ScaleX Invest. Ce n’est pas un chiffre conséquent mais cela montre que l’écosystème produit moins de nouvelles entreprises que d’entreprises qui disparaissent. »
Les entreprises les plus âgées ne sont pas non plus à l’abri des difficultés. « Par rapport à 2023, beaucoup plus d’entreprises matures ou qui avaient levé davantage de fonds connaissent des situations compliquées », souligne Sébastien Paillet. Ainsi, 10 entreprises ayant réalisé des séries C sont comptabilisées comme en difficulté, contre 5 en 2023. Leur présence dans le panel contribue à la hausse du montant des investissements réalisés, depuis leur création, dans les entreprises actuellement en difficulté qui a doublé en un an, atteignant plus de 3,25 milliards d’euros. Les start-up âgées de 9 à 11 ans sont également davantage concernées. « Les modèles économiques ne tenant pas leurs promesses, la capacité à lever des capitaux restant limitée et les valorisations élevées lors des précédents tours de tables, rendent plus compliqués les refinancements », explique Sébastien Paillet.
Les investisseurs sont en effet confrontés à des contraintes dans la gestion de leur portefeuille, les sorties (cotation, vente) étant devenues plus rares. « Les investisseurs deviennent très exigeants car les portefeuilles tournent moins, ce qui crée beaucoup de tensions dans l’écosystème, précise Sébastien Paillet. Ils examinent désormais les indicateurs de croissance et de rentabilité alors que précédemment ils se focalisaient davantage sur le potentiel de croissance. » Pour les start-up ayant réussi à lever des fonds, l’entrée de nouveaux capitaux n’est pas forcément synonyme de prospérité : 71 % des jeunes pousses en difficulté ont mené un tour de table au cours des trois années précédentes. « Ces dernières années, une grande partie des investissements étaient réalisés pour soutenir la croissance des sociétés, mais si celle-ci ne suit pas, il faut restructurer très vite, ce qui constitue un exercice souvent périlleux », juge Sébastien Paillet.
Cette année devrait suivre la même tendance que la précédente avec 29 entreprises entrées en procédures collectives en 2024, contre 12 en 2023. « Sortir d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire reste très difficile, comme le montrent les exemples des années précédentes, indique Sébastien Paillet. De plus, les financements publics dédiés à l’innovation qui soutenaient le développement des entreprises se réduisent. Cela souligne l’importance de s’appuyer aussi sur des investissements étrangers pour que l’écosystème soit pérenne. » Au sein de la French tech, de nouveaux secteurs tirent cependant leur épingle du jeu en attirant de nouveaux financements : l’intelligence artificielle et la défense en raison du contexte géopolitique actuel.