Qui sera concerné par le futur « impôt minimal » visant les riches, sur lequel planche Bercy, dans la perspective de la loi de finances pour 2026 ?
Pendant plusieurs semaines, avait circulé la rumeur selon laquelle seuls les « plus gros patrimoines » (supérieurs à 100 millions d’euros) pourraient être concernés, dès lors qu’ils paient peu d’impôt (l’équivalent de moins de 0,5 % de leur fortune). Ce ne sera pas le cas. Le gouvernement vise en fait les patrimoines de quelques millions d’euros seulement, voire à peine plus d’un million. La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, vient d'évoquer « un seuil proche de celui de l’IFI (1,3 million d’euros) », dans une interview aux Echos. Ce pourrait être un peu plus, mais certainement pas 100 millions.
Ce seuil de 1,3 million correspondait aussi à celui de l’impôt de solidarité sur la fortune, supprimé en 2018. S’agit-il donc, pour le gouvernement Bayrou, de rétablir l’ISF, au taux de 0,5 % ? Plusieurs centaines de milliers de contribuables seraient concernés, or ce ne sera pas le cas. Le nouvel impôt et feu l’ISF auront en fait une grande différence : le premier est un impôt "différentiel", qui vise uniquement les contribuables dont le total des impôts représente moins de 0,5 % du patrimoine. Ce total comprend l’impôt sur le revenu, la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, l’IFI et le prélèvement forfaitaire unique de 30 % sur les plus-values et dividendes, comme le précise Amélie de Montchalin. Or, pour la majeure partie des contribuables potentiellement concernés, affichant un patrimoine net de dettes supérieur à 1 ou 2 millions d’euros, la somme des impôts cités est aujourd’hui égale ou supérieure à 0,5 %. Ils ne seront donc pas touchés par la contribution imaginée par le gouvernement Bayrou, alors que tous ceux affichant une fortune supérieure à 1,3 million devaient, jusqu’en 2017, payer l’ISF.
L'outil de travail épargné
De plus, comme l’ISF, la future taxe ne visera pas l’outil de travail, c’est-à-dire les sociétés dont le contribuable est actionnaire, tout en y exerçant une fonction de dirigeant. C’est une grande différence avec les préconisations de l’économiste Gabriel Zucman, qui a inspiré la proposition de loi écologiste visant à taxer les patrimoines de plus de 100 millions d’euros à hauteur de 2 %. Outre le fait que le taux retenu est quatre fois plus élevé côté écologistes, le dispositif qu'ils proposent entend frapper toutes les holdings, qu’il s’agisse d’outil de travail ou pas. Y compris les « cash boxes », ces holdings familiales de grandes fortunes, qui détiennent des participations importantes dans des groupes du CAC 40, à l’exemple de Téthys, société holding de la famille Bettencourt-Meyers, actionnaire de L’Oréal à hauteur de 35 %.
Dans la version du gouvernement, ce ne sera donc pas le cas. Une société holding dont l’actif principal est constitué principalement d’une participation, même très importante, dans une entreprise, ne sera pas concernée par le projet préparé à Bercy. Cette holding n’entrera pas dans le champ du patrimoine du contribuable concerné, sauf pour ce qui concerne les actifs secondaires, n’ayant pas de rapport direct avec l’objet de la société (trésorerie excédentaire, immobilier, yachts…).