L'analyse de Jean-Louis Mourier
Des marchés actions «trop chers» ?
La valorisation actuelle des grands marchés actions est difficile à justifier. Des deux côtés de l’Atlantique, les ratios cours/bénéfices (PER) se situent au-dessus de leur moyenne de long terme (17,2 à un an sur le CAC 40), alors même que la dégradation de l’activité économique n’a jamais été aussi brutale. Alors que les analystes ont revu sensiblement à la baisse leurs prévisions de profits des entreprises pour les prochains mois, à la suite des résultats du premier trimestre, les grands indices boursiers sont restés solides.
Malgré l’incertitude qui règne sur les perspectives économiques et qui amène de nombreux dirigeants de grandes entreprises à renoncer à communiquer leurs attentes pour les prochains mois, les investisseurs semblent faire le «pari» d’un rebond rapide de l’activité économique, et par conséquent des chiffres d’affaires et des profits des entreprises. A moins que la solidité des indices actions soit uniquement attribuable au retour de l’effet «TINA», selon lequel les investisseurs sont «forcés» de se porter sur des actifs risqués en raison de la faible rentabilité (voire de la rentabilité négative) des actifs les moins risqués. Le maintien d’indicateurs de volatilité des marchés actions à des niveaux encore élevés plaiderait pour cette dernière hypothèse.
Quoi qu’il en soit, le risque d’un décrochage brutal des Bourses américaines et européennes, en cas de déception sur la conjoncture économique ou en cas de reconfinement forcé par l’arrivée d’une nouvelle vague épidémique, est important. En cas de rebond effectif de l’activité dès le mois de juin, le potentiel de hausse des marchés actions serait limité par leur valorisation actuelle, qui semble intégrer ce scénario rose…
Jean-Louis Mourier occupe la fonction d’économiste chez Aurel BGC, société de courtage qu’il a rejoint en 1998. Titulaire d’un DEA d’économie internationale obtenu à Grenoble, Jean-Louis Mourier exerce la profession d’économiste dans des institutions financières depuis plus de 20 ans. D’abord au sein du groupe Louis-Dreyfus, puis chez Aurel, il suit la conjoncture des pays de l’OCDE, et plus particulièrement de la zone euro, ainsi que de quelques économies émergentes. Il s’intéresse notamment aux politiques monétaires et aux mouvements internationaux de capitaux.