L’industrie des ETF en Europe devrait atteindre 1 000 milliards d’euros d’encours en 2020. De quoi susciter encore de nombreuses vocations parmi les gestionnaires d’actifs plus traditionnels. Pour autant, les sociétés de gestion spécialisées sur ce segment privilégient avant tout le recrutement d’experts déjà formés aux techniques de la gestion indicielle cotée.
Comment devient-on gérant d’ETF (ou exchange traded funds) ? Face à l’envolée en quelques années de l’industrie des fonds indiciels cotés, beaucoup de professionnels de la gestion d’actifs se posent aujourd’hui la question. Il est vrai que ce segment de marché offre aujourd’hui de nombreuses opportunités compte tenu de sa croissance encore forte. Selon les estimations de Lyxor, cette industrie en Europe qui cumule aujourd’hui 600 milliards d’euros d’encours devrait en effet atteindre 1 000 milliards d’euros en 2020, de quoi susciter encore de nombreuses vocations. Pour autant, les sociétés de gestion spécialisées sur ce créneau privilégient avant tout le recrutement d’experts déjà formés aux techniques de la gestion indicielle cotée. Difficile cependant de définir un profil type de gérant ETF, tant les parcours sont multiples.
Une formation académique solide indispensable
Un élément apparaît néanmoins commun à tous les gérants en fonction : une solide formation académique.
«Il est impératif que nos gérants soient très confortables avec les mathématiques financières, précise Julien Boulliat, responsable de l’équipe de gestion ETF au sein de Deutsche Asset Management, aujourd’hui à la tête d’une vingtaine de personnes basées à Londres et à Birmingham. Nous apprécions plus particulièrement des profils d’ingénieurs avec de bonnes compétences en informatique. Dans mon équipe, j’ai beaucoup de personnes qui ont fait leurs études en France. Des écoles telles que Centrale ou des universités telles que Dauphine restent par exemple un réel gage de qualité.» Les détenteurs du CFA sont également des profils très recherchés. «Mais la seule détention du CFA ne permet pas de devenir gérant ETF immédiatement», met en garde Raphaël Dieterlen, responsable de la gestion ETF et fonds indiciels chez Lyxor.
Des équipes mixtes et diversifiées
Au-delà de ce premier constat, il apparaît que les équipes de gestion sont souvent composées de profils mixtes, issus de divers environnements. «A mon arrivée en 2012, j’ai constitué une équipe avec différents profils, détaille Julien Boulliat. Je suis convaincu que la diversité est la meilleure alchimie. Certains gérants viennent de la gestion quantitative avec une expérience sur différentes classes d’actifs tandis que d’autres sont issus du corporate banking ou encore de la gestion indicielle.»
Au-delà de l’expertise technique nécessaire à l’exercice de cette profession, la gestion indicielle nécessite également des compétences spécifiques. «Il faut bien avoir à l’esprit que la gestion ETF est un métier très particulier, avec une technicité tout à fait propre», explique Raphaël Dieterlen. La gestion ETF ne se limite pas à connaître des indices car elle nécessite de comprendre toute l’infrastructure permettant un traitement en bourse de ce type d’instrument. «Par ailleurs, il faut bien avoir à l’esprit qu’un fonds est une véritable structure juridique dotée d’un actif et d’un passif, très encadrée par la réglementation, poursuit Raphaël Dieterlen. Tous ces mécanismes-là doivent donc être appris et gérés.»
Pas question donc de laisser un ancien gérant actions ou obligataires prendre du jour au lendemain les commandes d’une gestion ETF. Au sein de Lyxor, les juniors se voient en premier lieu confier des missions peu risquées. «Un nouvel arrivé dans l’équipe commencera par des tâches sans contact avec le risque opérationnel avant d’être formé pour monter en compétences, ajoute Raphaël Dieterlen. Dans les premiers mois de son apprentissage, il sera accompagné et évalué, de manière très concrète. Cela nous permet de juger de son niveau d’avancement. Il faut plusieurs années avant de pouvoir devenir un bon gérant ETF.»
Des profils seniors très recherchés
Si les profils juniors ont la possibilité de monter en puissance en débutant leur carrière au sein d’une équipe ETF, la reconversion pour des profils plus seniors de gérants sur les marchés plus traditionnels vers la gestion indicielle semble donc beaucoup plus délicate. En effet, l’expérience reste très valorisée. Ainsi, les profils seniors et experts de la gestion indicielle restent les plus recherchés. Avec l’augmentation de la demande de la part d’investisseurs institutionnels et privés, les équipes de gestion ont dû monter en charge en recrutant des profils immédiatement opérationnels. «Dans la gestion indicielle, les process sont fondamentaux, de ce fait nous devons recruter des personnes capables de les anticiper et de les améliorer, détaille Julien Boulliat. Au sein de mon équipe un quart voire un tiers des membres participent en effet à la création de nouveaux process.»
Les promoteurs, sources d’informations et de formations ?
S’il n’existe pas pour l’heure d’organisme indépendant qui délivre de la formation sur les ETF, les gérants traditionnels peuvent néanmoins progressivement se former à leur utilisation en les intégrant à leur gestion et en échangeant des informations avec les fournisseurs d’ETF. «Une partie de notre formation est délivrée par ces derniers, explique Mourtaza Asad-Syed, directeur général et CIO de Yomoni. En effet, nous rencontrons tous les mois nos fournisseurs. Bon nombre de leurs contenus promotionnels constituent une véritable source d’informations.» Une aubaine pour les experts de la gestion privée ou institutionnelle, qui sont de plus en plus nombreux à utiliser les ETF dans leurs investissements au quotidien. «Les ETF possèdent de nombreux avantages : ils peuvent être facilement transparisés pour les reportings au format Ampère et ils s’insèrent parfaitement dans le cadre du pilotage de notre allocation tactique», explique Cédric Fouché, directeur financier délégué d’Agrica Epargne.
Une situation qui n’a pas échappé aux sociétés spécialisées dans la gestion indicielle cotée qui formalisent mieux leur diffusion d’information. «Afin de répondre aux problématiques des investisseurs, nous avons créé ETPedia, une plateforme qui délivre de l’information sur les fondamentaux des ETF, mais également sur les risques encourus, le process de pricing, les coûts et les performances, explique Sihem Labbas, porte-parole pour ETF Securities. Autant d’outils synthétiques indispensables aux gérants dont le temps est extrêmement limité.» Des outils qui pourraient à terme aider les professionnels de la gestion d’actifs à mieux appréhender le marché des ETF, et pourquoi pas, ensuite, à y postuler.
Vendeurs d’ETF : des compétences techniques mais aussi pédagogiques recherchées
- Avec l’engouement grandissant des investisseurs (qu’ils soient institutionnels ou privés) pour les ETF, les profils commerciaux sont de plus en plus recherchés. Là encore, il n’existe aucune formation dédiée, cependant, de solides bagages académiques (profils ingénieurs, mathématiques financières ou finance) restent très appréciés. A cela s’ajoute une nécessaire capacité à la vulgarisation et à la pédagogie, permettant de rendre compréhensibles des produits parfois complexes à des investisseurs positionnés sur de nombreuses typologies d’actifs.
- Ces profils vendeurs et commerciaux sont en contact direct et constant avec leur clientèle, mais également avec les équipes opérationnelles. «L’ensemble des supports d’informations que nous fournissons à nos clients font l’objet d’une étroite collaboration entre nos équipes juridiques, ventes et marketing», assure Sihem Labbas, porte-parole pour ETF Securities. Les vendeurs et commerciaux doivent ainsi être à même d’avoir une vision globale des produits, de leur conception à leur utilisation au sein des sociétés de gestion d’actifs.