En dépit de la crise, la finance continue de recruter. L’alternance apparaît dans ce contexte comme un moyen efficace pour dénicher de jeunes talents. D’autant que la diversité des cursus désormais proposés par les écoles et universités s’est accrue, y compris à des niveaux master.
En 2020, 60 000 places en alternance ont été proposées en France sous la forme de contrats d’apprentissage, dont 11 115 dans les activités des secteurs financiers (hors assurances et caisses de retraite), selon les données officielles. L’alternance dans la finance a notamment permis de répondre à des besoins croissants ressentis par les entreprises. « Certains métiers de la finance d’entreprise, mais également au sein de cabinets d’expertise comptable ou d’audit, étaient déjà sous tension avant la crise, souligne Abdel Benhamma, directeur senior division finance et expertise comptable chez Page Personnel. C’est notamment le cas pour les comptables, les auditeurs, les gestionnaires de paie ou encore les contrôleurs de gestion. Une tension renforcée par le contexte sanitaire et économique de ces derniers mois, qui a généré de nouveaux besoins en termes de recrutements, que l’alternance a pu compenser en partie. »
Au sein des institutions financières, l’alternance est également une pratique courante que la crise ne semble pas avoir affectée, au contraire. Selon l’Association française des banques (AFB), les banques françaises comptent actuellement, au total, 15 200 alternants. Quant aux banques du réseau AFB, « elles accueillent actuellement 8 400 alternants, dont près de 6 000 ont été recrutés en 2020, explique Maya Atig, directrice générale de l’AFB. La crise n’a pas impacté les recrutements en alternance, toujours aussi nombreux dans le secteur bancaire. La proximité sous toutes ses formes – en agence, au téléphone, sur internet, etc. – qui constitue une valeur clé de la relation client a été renforcée par la crise, confirmant la place essentielle du conseiller bancaire. » Le secteur bancaire recrute ainsi des alternants qui sont orientés vers des métiers très divers, du conseiller de clientèle à l’informatique, en passant par exemple par le contrôle et les risques, le marketing et la communication. « Les possibilités de recrutement en alternance sont très larges et dépassent celles des métiers de la relation client, principaux pourvoyeurs de ce type de contrats », ajoute Maya Atig.
Le secteur bancaire recrute des alternants orientés vers des métiers très divers, du conseiller clientèle à l’informatique.
Une demande d’alternants supérieure au nombre de candidats
Globalement dans la finance, la demande d’alternants est ainsi, actuellement, supérieure au nombre de candidats disponibles. « Pour la rentrée 2021, deux tiers de nos étudiants en finance ont immédiatement trouvé une alternance, note Serge Darolles, professeur en finance et responsable de la mention finance à l’Université Paris Dauphine. Les autres sont en cours de recrutement. Gage que l’alternance séduit de plus en plus d’entreprises, le profil des recruteurs tend à se diversifier. Jusqu’à présent, les alternants en finance d’entreprise, banques ou assurances étaient surtout recrutés par des grandes entreprises ou institutions financières. Une nouvelle demande émerge aujourd’hui, de la part de groupes étrangers disposant de filiales en France. Ils se rapprochent des universités pour recruter des alternants, les former, les tester dans la perspective, ensuite, de les recruter en CDI. »
De plus en plus de formations en alternance
Du côté des étudiants, l’alternance séduit également de plus en plus d’autant que les parcours de formation en la matière se démocratisent et ce, quel que soit le niveau. « De plus en plus d’étudiants en finance cherchent à réaliser une partie de leur parcours de formation en alternance, souligne Ludovic Bessière, business director finance et comptabilité chez Hays. C’était déjà le cas pour un certain nombre d’étudiants en BTS comptabilité-économie, en 3e année de licence économie-gestion ou de comptabilité-contrôle-audit (CCA). Aujourd’hui, nous constatons que la demande d’alternance de la part des jeunes, mais aussi des entreprises, tend également à s’étendre au niveau master 1 et 2 ». D’ailleurs selon le spécialiste de l’intérim Page Personnel, un tiers des alternants dans la finance étudient actuellement en master 1 ou en master 2. « Cette année 10 % de nos étudiants en M1 finance et 30 % en M2 finance sont en alternance », précise de son côté Serge Darolles.
Pour ces jeunes, il s’agit d’une période professionnalisante intégrée au cursus de formation. Cette approche apparaît encore plus nette en cabinet d’expertise comptable, car l’alternance participe véritablement à la formation des collaborateurs. « Elle leur permet de s’essayer à différentes fonctions en lien avec leur formation académique au sein de l’entreprise qui les recrute, précise Emmanuel Millard, président de la DFCG. En entreprise, ils acquièrent par ailleurs des compétences différentes de celles enseignées dans les écoles et universités. Ils se familiarisent par exemple avec les outils digitaux, ce qui les rend plus rapidement opérationnels ensuite, lorsqu’ils arrivent sur le marché du travail ».
L’alternance leur offre également l’opportunité d’accéder à des formations en master 1 ou 2 dans des écoles de commerce ou des universités prestigieuses. « En effet, au-delà de la rémunération qu’ils perçoivent, la formation peut en effet être prise en charge par les OPCA appelés opérateurs de compétences (OPCO) depuis la réforme de la formation professionnelle du 1er janvier 2019 », ajoute Ludovic Bessière. Les OPCO ont pour vocation d’accompagner les entreprises dans leurs politiques de formation et de financer l’apprentissage. Pour répondre à cette demande croissante, écoles et universités adaptent de plus en plus leurs parcours de formation à l’alternance. C’est par exemple le cas des principaux masters en trésorerie tels ceux des universités de la Sorbonne, de Lille ou de Rennes, désormais tous proposés en alternance.
L’alternance portée par les aides de l’Etat
l En matière de recours à l’alternance, la finance s’inscrit dans la même dynamique que le marché de l’emploi en général. Ainsi, avec 495 000 contrats signés en entreprise en 2020 contre 353 000 en 2019, qui était déjà une très bonne année, l’apprentissage a, selon le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, connu une croissance de 40 %. « Ce recours a crû depuis la réforme de la formation professionnelle en 2018 et le plan “un jeune une solution” mis en place à l’été 2020 par le gouvernement pour aider les jeunes face à la crise Covid, précise Emmanuel Millard, président de la DFCG. Ces aides ont permis de maintenir la dynamique de recrutements des jeunes en alternance pour les rentrées étudiantes de 2020 mais aussi de 2021. » Dans le cadre de ce dispositif, elles s’élèvent à 5 000 euros pour un apprenti de moins de 18 ans et 8 000 euros, pour un majeur pour la première année de chaque contrat d’apprentissage conclu entre le 1er juillet 2020 et le 31 décembre 2021, préparant à un diplôme jusqu’au master (bac + 5 – niveau 7 du RNCP). Pour les contrats signés à compter du 1er juillet 2020 et jusqu’au 31 décembre 2021, cette aide est versée aux entreprises de moins de 250 salariés, sans condition, et aux entreprises de 250 salariés et plus si elles s’engagent à atteindre un seuil de 5 % de leurs effectifs sous contrats d’alternance ou favorisant l’insertion professionnelle.