Les directions financières ont plus que jamais besoin de candidats très expérimentés. Elles cherchent notamment des managers capables d’aider l’entreprise à préparer la reprise, tout en sachant s’adapter à l’évolution des modes de travail et de management actuels. Les cadres seniors, plus technophiles qu’il n’y paraît, sont, pour beaucoup, aptes à répondre à cette demande.
L’expérience vient avec l’âge… surtout dans la finance. Si la population cadre « jeune » se concentre surtout dans les fonctions d’études et de recherche et développement, les cadres de plus de 55 ans se trouvent, pour 22 % d’entre deux, dans les fonctions financières des entreprises (contre 17 % pour les moins de 55 ans) selon une étude de l’Apec.
« Cette tendance s’est confortée pendant ces derniers mois avec la crise sanitaire, constate Sébastien Denis, practice manager chez Michael Page. En effet, un senior dans la finance représente une ressource technique liée à une forte expérience à laquelle les recruteurs associent souvent une capacité à rassurer le top management en période de crise ou dans un contexte d’investissement, de croissance externe, de transformation digitale ou de problématique managériale. Partant de ce constat, il n’y a donc rien d’étonnant à ce que la période de crise que nous venons de traverser ait été propice aux recrutements de seniors. D’ailleurs, dans la finance le recrutement de ces profils est aujourd’hui lié à leur capacité à accompagner l’entreprise dans la gestion de la crise et de la reprise. » Un point de vue qui conforte l’étude de l’APEC selon laquelle 25 % des managers jugent que leur principal atout repose sur leur expérience « des cas et situations possibles », suivie de près par « leur expertise technique » (20 %). Ces profils expérimentés ont en effet vécu de nombreuses situations, difficultés et erreurs qui constituent un bagage solide pour affronter de nouveaux challenges et s’adapter aux imprévus tels que le contexte que nous traversons depuis 18 mois maintenant. D’autant plus que le background des cadres seniors implique en général un regard différent et du recul sur les pratiques de travail.
La différence par l’expérience
C’est ainsi souvent pour leur capacité à assurer une forme de continuité tout en aidant l’entreprise à s’adapter à la situation exceptionnelle générée par la crise que les profils seniors sont plus particulièrement recherchés aujourd’hui par les entreprises. « Alors que la crise a contribué à l’augmentation de la mobilité des collaborateurs, les seniors dans la finance sont plébiscités pour faire le lien entre les partants et les nouveaux arrivants, et leur aptitude, de par leur expérience, à gérer aussi bien les enjeux opérationnels que de management, poursuit Sébastien Denis. Les profils aux compétences transverses, un peu “couteaux suisses”, sont également recherchés pour gérer la période de crise et préparer la reprise. »
Des DAF, RAF et contrôleurs financiers seniors trés demandés
D’un point de vue plus opérationnel, la séniorité des candidats est surtout prisée pour des postes de directeur administratif et financier ou de responsable administratif et financier. Leur sensibilité aux problématiques de cash et leur expérience en gestion de crise ont également favorisé leur recrutement sur des fonctions liées au cash management ou au credit management. « La gestion du cash a, ces derniers mois, été une préoccupation majeure pour nombre d’entreprises, explique Guy Degeorges, directeur administratif et financier indépendant, président du groupe DAF à temps partagé de la DFCG. D’où leur intérêt porté généralement à des profils expérimentés en la matière, et sachant mettre en place des procédures propres à la récupération du cash. Alors que la crise touche à sa fin, nous constatons désormais aussi une appétence forte pour des profils expérimentés sur le pilotage de la performance, l’amélioration de la compétitivité et le financement aussi bien du besoin en fonds de roulement que de l’investissement. » Les postes de contrôleurs financiers seniors sont également en augmentation. « C’est notamment le cas dans les secteurs de l’industrie, du retail ou des services », ajoute Sébastien Denis.
«L’intérim, le temps partagé ou le management de transition répondent aux besoins actuels des entreprises qui cherchent avant tout des profils experts pour des missions souvent ponctuelles. La moitié des DAF à temps partagé ont plus de 50 ans.»
Moins de freins au recrutement des seniors
Les seniors ont ainsi encore un bel avenir dans la finance, d’autant que les préjugés sur les freins à leur recrutement se lèvent de plus en plus. « Par exemple, les seniors sont beaucoup plus technophiles qu’il n’y paraît, tient à préciser Guillaume Mouzet, CEO et fondateur d’Akigora, communauté de professionnels de la finance indépendants. Nombre d’entre eux ont en effet évolué au même rythme que le développement des nouvelles technologies et ont participé à la digitalisation de leur fonction. Ils maîtrisent généralement parfaitement les solutions de gestion propres à leur métier (comptabilité, prévision budgétaire, notes de frais, etc.). » Enfin, la rémunération n’est pas le seul driver des seniors. « Ils accordent aujourd’hui ainsi davantage d’attention au projet qui leur sera confié qu’à leur package salarial », souligne Sébastien Denis. De quoi rassurer également les entreprises en ces temps qui restent incertains. D’autant plus qu’avec la crise, le marché de l’emploi dans la finance s’est tendu. Les entreprises ont dû faire face à une augmentation des demandes de mobilité, de télétravail voire même de départs, entraînant une croissance des recrutements dans les fonctions financières. Les cabinets de recrutement constatent d’ailleurs à ce sujet que la demande de profils seniors porte davantage sur des remplacements suite à des départs, plutôt que sur des créations de postes, davantage réservées aux candidats entre 30 et 45 ans.
Les entreprises ont besoin de missions ponctuelles
- Les entreprises sont d’autant plus intéressées par les profils de financiers seniors que nombre d’entre eux se sont orientés vers le management de transition ou le travail en indépendant. Selon Guy Degeorges, président du groupe DAF à temps partagé de la DFCG, la moitié des DAF à temps partagé ont ainsi plus de 50 ans. L’intérim, le temps partagé ou le management de transition répondent en effet parfaitement aux besoins actuels des entreprises qui cherchent avant tout des profils experts pour des missions souvent ponctuelles, comme des projets de transformation digitale de la fonction finance (qui se sont accélérés avec la crise) ou la gestion de crise.
- « C’est ainsi pour gérer une situation d’urgence au sein de notre entreprise que nous avons fait appel à un manager de transition de 55 ans en qualité de directeur du contrôle de gestion, indique le directeur administratif et financier d’une entreprise du secteur du luxe. Au regard de cette situation, une personne expérimentée dans la gestion de crise et la conduite du changement dans le cadre d’une réorganisation plus globale du contrôle de gestion. L’expérience et la séniorité du candidat étaient ainsi, à mon sens, indispensables pour mettre la situation sous contrôle et prendre des décisions rapidement. » La temporalité de ces missions répond également aux besoins actuels des entreprises en termes de flexibilité et d’agilité.