Métier

Le credit manager sécurise le chiffre d’affaires de l’entreprise

Publié le 29 juin 2023 à 10h27

Chloé Consigny    Temps de lecture 7 minutes

Dans un contexte macro-économique incertain où le nombre de défaillances d’entreprises repart à la hausse, les credit managers sont très sollicités par les entreprises. Garants de la sécurisation du chiffre d’affaires, ils sont en lien constant avec les équipes opérationnelles. Ces experts, vus comme les plus commerciaux des financiers et les plus financiers des commerciaux, sont aujourd’hui très recherchés.

En 2023, le nombre de défaillances d’entreprises en France devrait renouer avec les niveaux d’avant la crise sanitaire. Selon les chiffres de l’Insee, ce sont environ 50 000 entreprises qui ont fait défaut durant l’année 2022, contre moins de 30 000 durant les années Covid-19. Un « retour à la normale » qui fait suite à la fin des prêts garantis par l’Etat, à laquelle vient s’ajouter un contexte macro-économique incertain ponctué de tensions sur les prix de l’énergie et des matières premières. Au sein des entreprises, les fonctions finance scrutent de près les encours clients afin d’anticiper tout défaut de paiement. Dans ce contexte, les credit managers sont particulièrement recherchés. « Avec des impayés qui repartent à la hausse, la fonction de credit manager prend de plus en plus d’importance au sein des organisations, explique Nicolas Flouriou, président de l’AFDCC, l’Association française des credit managers. De nombreuses entreprises sont aujourd’hui à la recherche d’experts. »

Une gestion des comptes clients de bout en bout

Les fonctions du credit manager sont multiples. Il réalise l’ouverture de compte pour les nouveaux clients en écartant tout risque de fraude. Egalement formé aux aspects juridiques, il supervise la rédaction des différentes clauses des conditions générales de ventes. Il a par ailleurs la charge de la partie assurance crédit et réalise pour chaque nouveau client une demande d’agrément auprès de l’assureur de l’entreprise. Dans certains cas, il peut également superviser l’affacturage. En cas d’impayé, il gère la partie recouvrement, d’abord à l’amiable, via l’envoi de relances, puis en cas de sinistre, auprès de l’assureur en réalisant une déclaration dans les 150 jours qui suivent l’impayé. Réalisée dans les temps, cette déclaration permettra à l’entreprise de récupérer la créance à hauteur de 80 % du montant dû. Il y a six mois, Ziyaad Duman est devenu credit manager groupe pour Pôle Thermique, marque qui regroupe sept entreprises spécialisées dans le génie climatique. Au quotidien, il gère 1 700 comptes clients, avec une mission simple : « sécuriser et accompagner le développement du chiffre d’affaires de l’entreprise, explique-t-il. Depuis mon arrivée, nous avons réalisé beaucoup d’encaissements et nous avons passé peu d’opérations en perte ».

«Le credit manager n’est pas perçu comme “un bloqueur de compte”, mais comme une aide au développement d’un chiffre d’affaires pérenne. »

Ziyaad Duman Credit manager groupe ,  Pôle Thermique

Une fonction hautement stratégique

Dans l’organigramme des grands groupes, les credit managers sont rattachés aux équipes credit management des directions financières. Ces équipes peuvent comprendre plusieurs dizaines de personnes et regroupent les analystes crédit, spécialistes de la prévention des risques, les analystes contentieux et les responsables recouvrement. En fonction de la typologie de l’entreprise et de son secteur d’activité, les équipes de credit manager sont plus ou moins étoffées. Ziyaad Duman est en train de recruter une équipe pour l’épauler, qui devrait être à terme composée de quatre responsables recouvrement, tandis que le groupe totalise 220 collaborateurs. Dans les groupes du CAC 40, et particulièrement au sein de ceux qui opèrent en B-to-B, il n’est pas rare de trouver plusieurs dizaines de responsables recouvrement, épaulés par cinq analystes crédit et contentieux et supervisés par un ou plusieurs credit managers. Dans ce cas, le volet préventif incombe aux analystes, tandis que la partie curative revient aux responsables recouvrement. Au sein des plus petites entités, la fonction de credit manager englobe les deux aspects.

Si la partie recouvrement (relance amiable puis déclaration de sinistre) reste la plus connue des fonctions de credit manager, ils sont également chargés de prévenir le risque d’impayés. Il s’agit pour chaque client d’établir un score de solvabilité à horizon un an. Aux données de l’assureur crédit qui, par exemple, donnera une alerte lorsqu’un client n’a pas honoré un paiement chez un autre fournisseur s’ajoutent les investigations menées en interne par les credit managers. « Je ne peux pas me contenter des alertes de l’assureur crédit, explique Ziyaad Duman ; je travaille notamment à partir du portail Infolegale mais également avec des sociétés de renseignements telles que Pouey, explique-t-il. Mon rôle est de détecter l’anomalie avant son occurrence. » Au-delà des éléments chiffrés, des informations moins formelles que les credit managers parviennent à capter en lien direct avec les commerciaux sont indispensables.

Un lien constant avec les équipes commerciales

« Un credit manager qui reste dans son bureau ne sert pas à grand-chose, explique Nicolas Flouriou. Nous sommes les plus commerciaux des financiers. Notre rôle est d’être à leur contact. Les qualités relationnelles et les capacités d’échange sont des compétences clés pour les credit managers. » Un constat largement partagé par Ziyaad Duman qui a choisi de positionner son bureau non pas au sein de la direction financière mais au sein de la direction commerciale car, « en étant en lien constant avec les équipes commerciales, il m’est plus facile de comprendre leurs enjeux et je pense que c’est réciproque, explique-t-il. Je ne suis pas perçu comme “un bloqueur de compte”, mais comme une aide au développement d’un chiffre d’affaires pérenne ». Au sein du groupe Pôle Thermique qui totalise 220 salariés, il est en contact direct avec le directeur général. « Nous faisons appel à un DAF externalisé, souligne-t-il. Dans mes fonctions, je réfère directement au directeur général et aux actionnaires. J’apprécie particulièrement ce contact direct propre aux entreprises familiales qui me permet, en cas de besoin, de relever le niveau de couverture pour un client. »

Jusqu’à 90 000 euros de salaire annuel

Le salaire moyen d’un credit manager s’établit à 38 000 euros bruts annuels, il atteint 45 000 à 50 000 euros bruts annuels pour un professionnel justifiant trois à cinq années d’expérience et peut grimper jusqu’à 90 000 euros bruts annuels pour un expert après huit années d’expérience. Sans diplôme bac + 5, les évolutions pour les responsables recouvrements sont, en revanche, plus rares.

De réelles opportunités d’évolution

Si les agents de recouvrement débutent généralement après un niveau bac, les analystes crédit intègrent cette fonction à l’issue d’un bac + 4. Pour les credit managers, le recrutement se fait généralement à l’issue d’un bac + 5 de formation financière ou école de commerce. « Il est difficile de monter les échelons sans un bac + 5 », constate Ziyaad Duman qui, après douze années d’expérience professionnelle, a repris le chemin de l’université. Il a validé un M2 mention finance parcours credit management à l’Université de Rennes 1. Néanmoins, une fois ce bagage académique en poche, les perspectives d’évolution sont réelles. « Il n’est pas rare qu’un analyste crédit évolue vers une fonction de credit manager, relève Nicolas Flouriou. Après quelques années d’expérience, un credit manager peut évoluer vers d’autres fonctions au sein de la direction financière, en trésorerie ou en contrôle de gestion. Certains peuvent même poursuivre au sein de la direction commerciale. »

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