Recrutement

Les banques d’affaires restent à l’affût de nouveaux talents

Publié le 6 mars 2023 à 18h54

Coralie Bach    Temps de lecture 7 minutes

Malgré le ralentissement des transactions, les opportunités d’emplois dans le secteur des fusions-acquisitions restent nombreuses, en particulier chez les spécialistes des small et mid caps. Les professionnels bénéficiant d’une expertise dans les domaines de la santé ou de la tech sont particulièrement recherchés.

L’heure est-elle vraiment au pessimisme pour les professionnels du M&A ? Au vu des baisses de bonus, relayées par la presse, dans les grandes banques internationales et de l’annonce en janvier par Goldman Sachs d’un plan de licenciements touchant 3 200 personnes dans le monde, il serait tentant de le croire. Et pourtant, les chasseurs de têtes l’affirment : les recrutements restent soutenus en France, avec une position toujours très favorable aux candidats. « Le marché s’est montré euphorique en 2021 et est resté dynamique en 2022. Pour l’heure, malgré la baisse du volume de transactions, nous ne pressentons pas de ralentissement des recrutements », relève Keven Boiteau, senior consultant au sein du cabinet Robert Walters.

Contrairement aux Etats-Unis, où les grands groupes donnent le la de l’activité, les marchés français et européens sont bien plus centrés sur le small et mid cap. Or, ces segments sont réputés pour leur résilience. La dernière édition de l’Argos Index, qui suit l’évolution des deals valorisés entre 50 et 500 millions d’euros sur la zone euro, note d’ailleurs une stabilité du volume de transactions. Les nombreux conseils, opérant sur ce segment, restent donc bien occupés. « La période n’est peut-être pas propice aux recrutements pour les grandes banques américaines, mais les opportunités au sein des boutiques small et mid cap restent très nombreuses, que ce soit pour renforcer une équipe existante ou accompagner le lancement d’une nouvelle structure », résume le chasseur de têtes Claude Calmon, fondateur de Calmon Partners Executive Search.

Un appel aux juniors

Dans ce contexte, la demande pour des postes de juniors et d’associates ne faiblit pas, les candidats privilégiés par les recruteurs étant toujours majoritairement issus des grandes écoles de commerce et d’ingénieurs. Outre le besoin de consolider certaines équipes, le flux de recrutements sur ces fonctions est par ailleurs alimenté par l’important turn-over que connaît le secteur. « Il existe un vrai défi de rétention des talents. De nombreux jeunes perçoivent le M&A comme un accélérateur de carrière, explique Françoise Fiorentino, associée au sein du cabinet Vendôme Associés. Ils passent quelques années en banque d’affaires, puis cherchent à se positionner sur des métiers connexes, au sein de fonds d’investissement, d’entreprises, ou de family offices par exemple. Outre un rythme de travail très exigeant, le fait de n’intervenir qu’au moment de la transaction, sans suivre l’entreprise dans la durée, représente une source de frustration pour certains. » Autant de départs réguliers qu’il faut a minima compenser.

Ceux qui persistent au moins six ans dans le métier peuvent quant à eux prétendre à un poste de vice pre-sident (VP). « Pour assurer cette fonction, il est important de pouvoir couvrir toutes les étapes d’un deal, de son origination à la relecture des documents juridiques », souligne Keven Boiteau. Un rôle clé qui laisse peu de place à la diversité des parcours. « Les recruteurs recherchent de purs professionnels du M&A, car le VP est le pivot d’exécution et le point de contact quotidien du client, souligne Françoise Fiorentino. Les profils un peu plus atypiques, en provenance des départements transaction services des Big Four notamment, peuvent en revanche être envisagés pour les postes plus juniors. »

Au-delà du savoir-faire technique, l’expertise sectorielle est toujours très appréciée, que ce soit pour créer une offre dédiée, ou simplement apporter une compétence supplémentaire au sein d’une équipe plus généraliste. Les spécialistes de la santé, de l’infrastructure et de la tech font partie des plus prisés. La baisse des valorisations des sociétés opérant dans les nouvelles technologies n’a en effet pas mis fin aux ambitions dans ce domaine. « Le secteur est très vaste, pointe Claude Calmon. Certaines verticales, comme l’intelligence artificielle, la cybersécurité ou encore les logiciels SaaS attirent toujours les investisseurs, conduisant donc les conseils à se structurer dans ces domaines. »

«Pour le poste de vice president, les recruteurs recherchent de purs professionnels du M&A car le VP est le pivot d’exécution et le point de contact quotidien du client. »

Françoise Fiorentino Associée ,  Vendôme Associés

Vers un début de diversification

Si l’intégration de compétences sectorielles dans les boutiques n’est pas nouvelle, certaines vont plus loin dans leur réflexion stratégique. « Nous travaillons actuellement avec deux banques américaines qui cherchent à diversifier leur offre, indique Keven Boiteau. Outre le conseil en financement de transaction, elles étudient la création d’autres services financiers, liés à des produits de trésorerie ou des dérivés de crédit par exemple. La demande en termes de recrutement porte, dans ce cas, sur des profils polyvalents capables de naviguer entre les différentes offres de services. » Le conseil M&A étant par nature très fluctuant, certains acteurs tentent en effet d’élargir leurs sources de revenus. « Les banques cherchent à suivre le client le plus longtemps possible, appuie Claude Calmon. Beaucoup d’entre elles interviennent ainsi à la fois sur des levées de fonds, y compris early stage, et des acquisitions. Certaines proposent aussi des services de directeur financier à temps partiel, pour des start-up notamment. » C’est le cas par exemple d’Impulse Corporate Finance ou de 2CFinance, deux spécialistes du conseil financier qui ont intégré la direction financière externalisée à leur offre.

Cette volonté d’élargir le spectre de l’activité s’illustre également par les déploiements régionaux. Les marchés des grandes villes de province sont ainsi de plus en plus traités localement générant des recrutements. Adviso Partners a par exemple consolidé son bureau lyonnais en décembre dernier avec l’arrivée d’un nouveau directeur exécutif. Clearwater a pour sa part consolidé son antenne marseillaise avec l’arrivée d’un associate et de deux analystes, tandis que quelques mois plus tôt, Transactions & Cie a étoffé son bureau bordelais avec l’arrivée d’une nouvelle associée. Quelques exemples qui illustrent l’opportunité pour les candidats d’exercer leur métier en dehors de la sphère parisienne dans des conditions financières qui, aux dires des chasseurs de têtes, sont proches de celles observées dans les structures mid caps de la capitale. 

Avantage aux candidats

  • Entre employeurs et candidats, le rapport de force reste clairement en faveur des seconds. Et si tout le monde accepte le jeu des négociations, les chasseurs de têtes déplorent certains abus. « Nous faisons face à des candidats qui, du jour au lendemain, ne donnent plus de nouvelles, raconte Françoise Fiorentino. D’autres sont rattrapés par leur ancien employeur ou attendent de recevoir plusieurs offres afin de choisir celle qui les intéresse le plus. Ces comportements complexifient et rallongent les process de recrutement. » Un constat également opéré par Claude Calmon : « Il nous arrive d’être confrontés à des candidats qui signent leur contrat mais ne se présentent pas le jour J. Il faudrait remettre un peu plus de professionnalisme dans la recherche d’emploi », plaide-t-il.
  • Toutefois, malgré les tensions observées sur le marché, les cabinets de recrutement ne prévoient pas d’envolée des salaires. Ceux-ci devraient se maintenir à des niveaux élevés. Ainsi, selon l’étude salariale 2023 de Robert Walters, la rémunération, hors bonus, d’un analyste possédant entre cinq et 10 ans d’expérience se situerait entre 55 k€ et 70 k€, tandis que celle d’un VP pourrait monter à 90 k€ pour une ancienneté similaire, et jusqu’à 120 k€ pour un profil de plus de 10 ans d’expérience.
  • Pour faire la différence, au-delà des aspects financiers, les banques d’affaires sont incitées à présenter très clairement les évolutions de carrière possibles, avec des grades et objectifs associés bien définis. Enfin, le secteur n’échappe pas au thème de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, avec entre autres des attentes en matière de télétravail, même si chacun reste conscient du rythme exigeant de la profession.

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