Recrutement

Les embauches repartent au sein des directions financières

Publié le 19 décembre 2014 à 19h25

Guillaume Clément

Après une année 2013 morose, les fonctions financières ont recommencé à recruter en 2014. Si les remplacements de collaborateurs restent la principale raison des embauches, les créations de postes sont en hausse. Les candidats les plus recherchés sont ceux qui allient expertise technique, polyvalence et capacités managériales.

En 2014, le marché de l’emploi semble avoir retrouvé un certain dynamisme dans les fonctions financières, après une année 2013 qualifiée d’atone par les cabinets de recrutement. «Il est trop encore trop tôt pour parler de reprise, mais nous avons bel et bien assisté à un léger déblocage des embauches cette année», constate Mikaël Deiller, senior executive manager chez Michael Page. Ainsi, Robert Half a vu le volume de ses mandats augmenter de 10 % par rapport à 2013. Une tendance confirmée par le cabinet Nicholas Angell. «De nombreuses entreprises privilégient les mobilités internes ou mobilisent leurs propres réseaux avant de faire appel à un cabinet pour un recrutement externe, reconnaît Valérie Kolloffel-Clavert, chasseur de têtes chez Nicholas Angell. Mais cela ne change rien au fait que nous avons constaté davantage de mouvements au sein des directions financières depuis un an.»

Très minoritaires ces dernières années, les créations de postes sont reparties à la hausse, notamment en ce qui concerne les fonctions de contrôleur de gestion, de directeur comptable, de contrôleur financier ou de directeur de l’audit interne. «En 2013, les remplacements représentaient les trois quarts de nos mandats, note Bruno Fadda, directeur chez Robert Half. Cette année, plus de deux demandes sur cinq concernaient des postes nouvellement créés.» Une tendance positive à relativiser néanmoins. «Ces “nouveaux” postes regroupent en fait souvent plusieurs fonctions exercées précédemment par différents collaborateurs, explique Valérie Kolloffel-Clavert. En conséquence, cela a donné lieu à la mise sur le marché de très belles opportunités cette année. Mais cela ne signifie pas pour autant que les effectifs des directions financières ont augmenté.»

La fin de l’attentisme

L’une des raisons avancées par les recruteurs pour expliquer cette reprise progressive des embauches est la fin de l’attitude «attentiste» des directions d’entreprise. «Même si la situation macroéconomique n’est guère plus réjouissante qu’en 2013, les entreprises sont conscientes qu’elles ont besoin de recruter pour assurer leur développement», analyse Mikaël Deiller. C’est le cas, par exemple, des entreprises qui se sont lancées dans des opérations de restructuration et de croissance externe, en procédant à des acquisitions ou à des LBO. Les transformations que ces démarches entraînent nécessitent en effet d’adapter, voire de réorganiser complètement les procédures, les structures hiérarchiques et les systèmes informatiques. Plus largement, en limitant fortement les embauches depuis la crise de 2008, les sociétés se sont retrouvées confrontées à des difficultés de fonctionnement.«A force d’être en sous-effectifs, les collaborateurs financiers peuvent faire des erreurs, ne pas réussir à produire leurs reportings dans les temps, se démotiver et in fine décider de quitter l’entreprise, avertit Bruno Fadda. Ainsi, certaines entreprises relancent des recrutements afin de privilégier une organisation pérenne des équipes comptables et financières plutôt qu’une maîtrise des coûts salariaux à tout prix.»

Les profils polyvalents plébiscités

Cette reprise des embauches ne profite toutefois pas à l’ensemble des profils. En effet, les entreprises sont de plus en plus exigeantes dans leurs recrutements, et demandent aux candidats postulant à des postes de «top management» de présenter des compétences davantage étendues qu’avant la crise de 2008. «Les directeurs financiers et hauts responsables doivent désormais être experts dans leur domaine, mais aussi capables de se comporter en véritables “business partners” avec les autres départements et les interlocuteurs externes de l’entreprise, tels que les investisseurs ou les clients», prévient Pauline Magat, senior manager de la division finance chez Robert Walters. Cette capacité de coordination doit, de plus, pouvoir s’exercer dans un environnement international et complexe. «Les organisations matricielles, les lignes hiérarchiques fluctuantes et le management à distance nécessitent des compétences en communication toujours plus développées, confie Mikaël Deiller. Les hauts cadres financiers doivent maîtriser les langues étrangères, et faire preuve de diplomatie, de flexibilité et d’ouverture d’esprit dans leurs rapports avec leurs collaborateurs internationaux.»

Les profils d’auditeurs ont aussi connu un regain d’intérêt de la part des recruteurs en 2014. «Contrairement à l’an dernier, les grands groupes ont créé de nouveaux postes pour les profils à haut potentiel, notamment dans les départements d’audit interne, remarque Pauline Magat. Recherchant plutôt des candidats venant de cabinets spécialisés, ils ont surtout ciblé des professionnels présentant des compétences poussées à la fois en finance et en informatique. Si cela ne témoigne pas d’une volonté de retirer des mandats à leurs prestataires informatiques, on constate une volonté croissante de disposer de compétences équivalentes aux leurs en interne.»La capacité de s’adapter à des outils de travail qui évoluent rapidement est d’ailleurs désormais demandée à l’ensemble de la fonction financière.«Cette faculté d’adaptation est bien plus valorisée qu’il y a dix ans, se souvient Mikaël Deiller. A l’époque, les entreprises attendaient des candidats qu’ils sachent uniquement se servir d’emblée des logiciels informatiques en place. Ce critère est bien moins pertinent aujourd’hui, compte tenu de l’évolution rapide de ces outils.»

Ces tendances plutôt positives devraient se poursuivre en 2015, selon les recruteurs, tant au niveau du volume d’offres que du type de profils recherchés.

Chiffre

86 % des directeurs financiers en France sont préoccupés par le départ de leurs meilleurs collaborateurs, selon une étude de Robert Half publiée en juillet dernier.

Les sociétés sous LBO recherchent des directeurs financiers

Cette année, les directeurs financiers ont été particulièrement prisés par les PME et les ETI sous LBO. «Nous avons observé une recrudescence de ces demandes, observe Valérie Kolloffel-Clavert, chasseur de têtes chez Nicholas Angell. Il s’agit surtout de sociétés qui ont réalisé un ou plusieurs LBO avant 2008 et qui se retrouvent aujourd’hui confrontées à d’importantes difficultés de trésorerie, compte tenu de la mauvaise conjoncture économique en Europe.» Elles attendent donc avant tout des directeurs financiers qu’ils redressent leurs comptes, optimisent leur cash et mènent des opérations de restructuration.

Les candidats en position de force ?

Réticents à changer d’entreprise ces dernières années en raison de la conjoncture morose, les collaborateurs financiers ont été plus mobiles en 2014. «Cette reprise des mouvements est surtout due à des frustrations professionnelles, estime Pauline Magat, senior manager de la division finance chez Robert Walters. Les candidats réalisent que leurs perspectives d’évolution au sein de leur société sont limitées et décident donc de partir.» Selon une étude publiée en juillet dernier par Robert Half, 84 % des directeurs financiers en France ont eu du mal à recruter des collaborateurs qualifiés en 2014. De ce fait, les meilleurs profils ont été davantage approchés par plusieurs entreprises à la fois qu’ils ne l’avaient été ces dernières années. «Conscients de leur relative position de force, les candidats ont été plus à l’aise pour se positionner sur le marché, avec néanmoins des négociations salariales qui sont restées modérées», poursuit Pauline Magat. La durée des recrutements s’est pour sa part maintenue entre deux et quatre mois en moyenne. Le nombre d’interlocuteurs est aussi resté important, les candidats rencontrant jusqu’à sept personnes pour certains postes, selon les cabinets de recrutement.

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