Directions financières

Les profils spécialisés que les entreprises s’arrachent

Publié le 6 juin 2014 à 17h23    Mis à jour le 24 juillet 2014 à 15h31

Arnaud Lefebvre

Même s’il s’agit d’un marché de niche en termes de recrutement, les collaborateurs disposant d’une expertise pointue dans certains domaines financiers restent très recherchés au sein des entreprises. Pour ces profils, qui concernent notamment des postes de fiscalistes et de spécialistes des normes comptables, les rémunérations proposées sont généralement substantielles.

Vous êtes incollables sur le calcul des CVA et des DVA ? La fiscalité des pays africains ou sud-asiatiques n’a aucun secret pour vous ? Vous maîtrisez les rouages de la création d’un centre de services partagés ? Dans ce cas, vous n’éprouverez aucune difficulté à trouver un nouvel emploi ! Même si l’essentiel des recrutements effectués actuellement au sein des directions financières d’entreprises porte sur des profils généralistes, opérant notamment en comptabilité et en contrôle de gestion, ces dernières n’en demeurent pas moins en quête permanente de collaborateurs disposant d’une expertise approfondie dans un domaine particulier. «Chaque année, nous sommes en effet régulièrement sollicités pour identifier de tels candidats», confirme Johann van Nieuwenhuyse, directeur senior chez Michael Page.

Mais compte tenu du degré d’expertise recherché par les sociétés, il s’agit toutefois d’un marché de niche, tant du côté de l’offre que de la demande. Si quelques fonctions spécifiques au secteur d’activité des groupes font actuellement l’objet d’un vif intérêt, comme par exemple celle de responsable en financement de projets, cette tendance concerne plus largement trois professions.

Fiscalité : le casse-tête des prix de transfert

Quelle que soit la taille des sociétés, la fiscalité est souvent considérée comme l’un des principaux écueils. Mais ce constat est davantage marqué pour les groupes qui affichent une large présence à l’international. En effet, les niveaux d’imposition fluctuent sensiblement en fonction des pays mais aussi des biens vendus.«Dans la mesure où les sociétés ont une exposition croissante aux marchés étrangers, ils cherchent à s’entourer d’experts en fiscalité internationale, explique Bruno Fadda, associate director de Robert Half finance et comptabilité. Nous avons un flot récurrent de demandes en ce sens.» La maîtrise des règles fiscales de pays qualifiés d’«exotiques» par les cabinets de recrutement, principalement en Afrique et en Asie, constitue notamment une qualité très appréciée. En outre, la problématique des prix de transfert, qui correspondent aux prix pratiqués entre des entreprises associées établies dans différents pays pour leurs transactions intragroupes, focalise l’attention de la plupart des entreprises. En effet, ce type de transactions fait l’objet d’une vigilance renforcée de la part de l’administration fiscale. Afin de prévenir tout contentieux fiscal en la matière, les directions financières sont donc en quête, là aussi, de professionnels du sujet.

Dans les deux cas, les sociétés visent exclusivement des profils confirmés. En effet, le candidat doit généralement bénéficier d’une expérience d’une dizaine d’années sur la thématique concernée, soit en cabinet, soit en entreprise, soit dans les deux types de structure. Compte tenu d’un tel curriculum vitae, la rémunération offerte est substantielle. «Les sociétés achetant un savoir-faire, elles sont prêtes à mettre le prix», constate Johann van Nieuwenhuyse. Ainsi, les revenus annuels peuvent, en fonction du parcours et de l’entreprise, s’établir dans une fourchette comprise entre 70 000 euros et 90 000 euros. A cela peut s’ajouter une part variable d’environ 10 % de cette somme.

Comptabilité : des normes de plus en plus techniques

Même si la vague d’embauches liées à l’adoption du référentiel IFRS remonte au milieu des années 2000, de tels mouvements demeurent réguliers. «Dès qu’un collaborateur en charge de ces problématiques change de fonction, son poste ne reste jamais vacant», signale Johann van Nieuwenhuyse.

Alors que de nouvelles normes comptables entrent en vigueur quasiment chaque année, les directions financières préfèrent le plus souvent confier le suivi à des spécialistes. «Depuis janvier 2013, la norme IFRS 13 oblige, pour valoriser un dérivé dans notre bilan, à prendre en compte le risque de la contrepartie avec laquelle nous établissons le contrat, explique Hervé Labbé, directeur de la salle des marchés et des études macroéconomiques d’Orange. Pour ce faire, les règles de calcul sont extrêmement complexes. Nous avons donc attribué la gestion de cette tâche à un spécialiste, qui maîtrise parfaitement les modèles mathématiques à utiliser.»

De la même manière que pour les fiscalistes, les entreprises ciblent dans l’ensemble des profils seniors, disposant d’une expérience d’au moins sept ans. La combinaison d’un passage en cabinet et en entreprise constitue un atout majeur. En termes salariaux, la situation varie selon le poste à pourvoir, le parcours du candidat et la taille du groupe. «Néanmoins, la part fixe est généralement comprise entre 60 000 euros et 70 000 euros, indique Bruno Fadda. Pour les fonctions de responsable, celle-ci peut même monter jusqu’à 110 000 euros.»

Actuellement, les profils les plus recherchés concernent des experts en consolidation et en évaluation des engagements de retraite.

Transformation de la fonction finance : une volonté croissante d’optimiser les processus

Même si la transformation de la fonction finance ne constitue pas un métier en soi, cette thématique occupe pour autant une place importante au sein des grands groupes. «Nous sommes fréquemment mandatés par des entreprises qui souhaitent optimiser le fonctionnement de leur direction financière, explique ainsi Johann van Nieuwenhuyse. Le cas échéant, ces dernières sont en quête de collaborateurs très expérimentés, ayant déjà réorganisé la fonction finance d’autres sociétés pour en améliorer la productivité.»

Là encore, il s’agit de profils très rares.«Idéalement, les candidats doivent jouir d’une expérience à la fois en cabinet et en entreprise, précise Johann van Nieuwenhuyse. Au-delà d’un bagage technique très solide, une parfaite connaissance des enjeux opérationnels est en outre nécessaire.» Autant de qualités qui justifient une rémunération annuelle allant de 80 000 à 100 000 euros.

Les profils les plus sollicités sont ceux de spécialistes dans la mise en place de centres de services partagés, mais aussi de professionnels de la gestion de projets.

Réglementation : les compagnies d’assurance se renforcent, pas les banques

• L’entrée en vigueur de la réglementation Solvabilité 2, le 1er janvier dernier, conduit de nombreux groupes d’assurance à s’entourer de spécialistes du sujet. «Les demandes de recrutement liées à l’instauration du nouveau cadre réglementaire constituent actuellement une tendance forte, confirme Baptiste Lambert, manager au sein de la division banque et assurance de Robert Half Financial Services. Elles portent sur des principalement sur des profils d’actuaires spécialisés sur les problématiques liées à Solvency 2.» Afin de pourvoir ces postes, un diplôme d’une école d’actuariat est nécessaire. En outre, le candidat doit bénéficier d’au moins trois à cinq ans d’expérience en cabinet et/ou en compagnie d’assurance. La part fixe de la rémunération est le plus souvent comprise, en fonction de l’assureur et de la séniorité du collaborateur, entre 45 000 euros et 70 000 euros par an. Une part variable allant de 10 % à 15 % de cette somme peut également compléter ces revenus.

• Dans le secteur bancaire, en revanche, l’introduction de nouveaux ratios prudentiels découlant de la réglementation Bâle 3 ne s’est pas traduite par une vague de recrutements. Cette situation s’explique par deux facteurs. «Les banques sont actuellement engagées dans une phase de restriction budgétaire, ce qui tend à limiter les embauches, indique Baptiste Lambert. De plus, le suivi relatif à la mise à la mise en place de Bâle 3 est généralement confié aux collaborateurs qui s’étaient déjà occupés d’un tel chantier lors de l’entrée en vigueur de Bâle 2.»

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