lors que Precia Molen a réussi à atteindre dès 2019 son objectif de 136 millions d’euros de chiffre d’affaires fixé initialement pour 2020, le groupe spécialisé dans le pesage industriel et commercial dispose d’une forte exposition au marché français. Sa direction n’anticipe néanmoins qu’un faible impact de la crise sanitaire sur ses équilibres financiers, notamment grâce à la reprise rapide de son activité. Le groupe a d’ailleurs pu finaliser un emprunt bancaire dont la négociation avait débuté avant le confinement.
Comment la crise sanitaire actuelle affecte-t-elle votre activité ?
Nous avons 11 usines, en Europe, au Maroc, au Brésil, en Inde, aux Etats-Unis et en Australie. Notre usine indienne est celle qui a été la plus touchée : elle vient seulement de rouvrir après deux mois d’arrêt total. Mi-mars, nous avons dû fermer pendant quasiment deux semaines nos deux usines en France. Leur réouverture s’est faite progressivement, pour atteindre 100 % de leurs capacités habituelles mi-mai. Les autres usines n’ont pas fermé.
Notre pôle services, dédié notamment à la réparation des instruments de pesage, a quant à lui maintenu près de 50 % de son chiffre d’affaires pendant le confinement. Il est en progression depuis la fin du confinement pour atteindre à ce jour 90 % de son niveau normal.
Au total, au premier trimestre, nous avons enregistré une baisse de notre chiffre d’affaires de – 10,1 % en France par rapport à l’an dernier à la même date, de – 6,4 % dans le reste de l’Europe et de – 4,8 % dans le reste du monde.
Globalement, notre carnet de commandes pour l’année reste toutefois élevé. Le rétablissement de notre capacité de production et de services ainsi que l’apport significatif de notre récente acquisition, la société lituanienne Milviteka, devraient donc limiter l’impact sur notre chiffre d’affaires et nos résultats 2020.
La direction financière a-t-elle dû prendre des mesures particulières dans ce contexte exceptionnel ?
Au début du confinement, nous avons constaté des délais de paiement particulièrement longs de la part de certains clients, grands comptes notamment. Nous avons eu jusqu’à deux mois de retard. Cette situation était d’autant plus préjudiciable pour notre besoin en fonds de roulement que nous n’avons pas cessé de payer nos fournisseurs dans les délais habituels. Nous avons donc mobilisé les équipes de la direction financière ainsi que nos commerciaux afin de relancer nos clients.
En ce qui concerne nos relations avec nos banques, nous n’avons pas eu de problèmes particuliers. D’une part, toutes nos banques ont spontanément reporté nos échéances d’emprunt de six mois. D’autre part, le 31 mars, nous avons pu finaliser la levée d’un emprunt d’investissement de 5 millions d’euros auprès du Crédit Mutuel, dont les démarches avaient été entamées avant la crise sanitaire. Nous avons pu obtenir ce prêt dans les mêmes conditions que celles prévues initialement.
Ensuite, en avril, nous avons décidé de décaler d’un mois notre calendrier d’arrêté des comptes, initialement prévu entre le 15 et le 30 avril. En effet, l’audit de nos états financiers était en cours avant le confinement, et son déroulement à distance était complexe (difficulté à récupérer certains justificatifs notamment). Nous avons également sollicité l’AMF afin de décaler d’un mois, du 30 avril au 31 mai, la publication de notre rapport annuel, ce qui a été accepté. Nos objectifs pour 2020 ont en outre été suspendus, nous savons qu’il y aura un impact, même s’il va y avoir un effet rattrapage. Notre budget 2020 est en cours de réestimation.
A quels dispositifs publics avez-vous eu recours ? Les démarches ont-elles été difficiles ?
Nous avons eu recours au chômage partiel pour environ 60 % de nos effectifs en France, ce qui nous a permis de réduire notre masse salariale sur la période. Les démarches administratives pour en faire la demande ont toutefois été lourdes. En effet, alors qu’au départ il avait été annoncé que chaque société devait en faire la demande, lorsque le décret est paru, nous avons finalement appris que c’était à chaque établissement de faire ses propres démarches. Or en France, une de nos sociétés compte 53 établissements !
En revanche, nous n’avons pas sollicité de prêt garanti par l’Etat, ni de report de charges sociales, car nous disposions de liquidités suffisantes pour régler nos échéances (cash disponible équivalent à 6 mois de dépenses). Ce choix a été conforté par notre souhait de pouvoir choisir de verser ou non des dividendes à nos actionnaires, ce qui semblait incompatible avec l’obtention de ces aides.
Comment la direction financière de Precia Molen s’est-elle organisée ces dernières semaines et comment travaille-t-elle aujourd’hui ?
Tout d’abord, au niveau de la direction générale, le comité de direction dont je suis membre, qui a normalement lieu mensuellement, a été mis en place de façon hebdomadaire afin de traiter de l’organisation du travail, des protocoles sanitaires à mettre en place, du plan de continuité d’activité, etc.
Ensuite, l’ensemble de la direction financière, soit une quinzaine de personnes en France, a été mise en télétravail dès mi-mars. Si au départ nous avons dû vérifier que chacun était suffisamment équipé pour travailler à distance, notamment pour assister à des visioconférences, le télétravail s’est très bien déroulé. La principale difficulté que nous avons rencontrée concerne la réalisation des audits à distance alors qu’aucune souplesse n’a été permise par les commissaires aux comptes. Aussi la révision de notre processus budgétaire du premier trimestre a-t-elle dû être réalisée à distance, via MS Teams, alors que d’habitude nous nous déplaçons dans les filiales pour rencontrer les opérationnels.
Auparavant, nous n’avions recours qu’occasionnellement au télétravail, sans accord d’entreprise défini. Désormais, nous envisageons de mettre en place des règles concrètes sur le télétravail. Par ailleurs, plusieurs membres de la direction financière, notamment les comptables, ont dû apurer leurs congés en avril car c’est la période pendant laquelle leur charge de travail est habituellement moins lourde puisqu’elle se trouve après la clôture annuelle.
Depuis la mi-mai, tous les salariés de la direction financière sont désormais de retour au bureau, sauf ceux qui doivent partiellement continuer l’encadrement scolaire de leurs enfants. Il y avait une réelle volonté de leur part de retourner au bureau. Comme nous sommes situés en Ardèche, nous n’avons pas la problématique des transports en commun.
Quels sont vos principaux chantiers pour les semaines à venir ?
Nous finalisons l’ensemble des déclarations fiscales et nous nous préparons à la clôture semestrielle consolidée de fin juin. Malheureusement, certains projets structurants de l’année 2020 ont vu leur date de départ repoussée, mais ils devraient pouvoir être finalisés.