L'objectif du programme de financement durable en Europe est d'améliorer la transparence et la comparabilité des activités vertes afin de minimiser le risque de greenwashing et d'élargir l'accès au financement pour la transition vers une économie verte, inclusive et résiliente. Cependant, malgré tous les efforts, cet objectif n'a pas été atteint. Pourquoi? L'approche actuelle présente un défaut de conception important.
De nombreux produits d'investissement se présentent comme durables mais on peut se demander si ces produits le sont vraiment. Les investisseurs particuliers ne peuvent souvent se fier qu'au nom d'un produit d'investissement pour déterminer s'il est durable. Il est trop complexe et impossible pour les investisseurs de regarder sous le capot de chaque produit d'investissement pour déterminer si les investissements peuvent être qualifiés de durables ou non. Actuellement, il n'existe aucun mécanisme en place qui pénalise les produits d'investissement qui sont faussement étiquetés durables à tord.
Le règlement de l'UE sur la divulgation des informations financières durables (SFDR) a été introduit pour accroître la transparence sur la manière dont les risques et opportunités en matière de développement durable sont intégrés dans les décisions d'investissement. Et c'est exactement là que réside le défaut de conception. L'agenda de la finance durable est conçu de telle manière que la charge de la preuve incombe aux produits d'investissement durables. Ils doivent mettre en place des processus, des données et des rapports pour soutenir leurs revendications “vertes”. Même pour une organisation axée sur l'impact comme Triodos Investment Management, l'ajustement des processus et l'acquisition des données nécessaires pour répondre aux exigences réglementaires nécessitent des efforts considérables, car notre propre approche d'investissement diffère de ce que la législation SFDR exige de nous. Cela signifie une augmentation des coûts pour les investisseurs durables. Aucun rapport n'est requis si un produit d'investissement ne porte pas le label “vert” ou “durable”. Fait intéressant, ce sont généralement ces produits d'investissement qui font le plus de mal et d'où devrait provenir la transition indispensable.
De plus, la conception actuelle du SFDR n'incite pas les investisseurs à rendre leurs produits d'investissement plus durables, car cela signifierait plus de travail et entraînerait des coûts plus élevés. C'est exactement le contraire de ce que nous voulons et de ce dont notre société a besoin. Nous avons besoin que les produits d'investissements durables deviennent moins chers et que les produits d'investissements nuisibles deviennent plus chers. Des coûts plus élevés représenteraient alors également le véritable prix de ces investissements pour la société et stimuleraient le passage d'investissements nuisibles à des investissements durables.
Bien qu'il y ait une croissance de la finance durable, le financement des activités économiques néfastes se poursuit. La transition vers une économie plus verte ne va pas assez vite. En mars 2022, la Plateforme sur la finance durable a publié son rapport final sur les options d'extension de la taxonomie qui souligne la nécessité et l'urgence d'accélérer la transition vers une économie plus verte. Il présente l'ambition de classer toutes les activités économiques sur une échelle allant de nocive, intermédiaire, neutre à verte, les activités intermédiaires étant des activités qui doivent continuer à améliorer leurs performances environnementales dans le temps. Le rapport indique en outre qu'une plus grande transparence est nécessaire pour savoir si les flux financiers sont dirigés vers des activités qui contribuent de manière substantielle à résoudre la crise environnementale et climatique.
Nous pensons qu'une plus grande transparence des activités nuisibles répondra aux préoccupations soulevées ci-dessus, et nous saluons le plan de l'UE visant à développer des options d'extension de la taxonomie. Cependant, nous vous conseillons fortement d'adopter une approche simple et de vous concentrer exclusivement sur les activités nuisibles. Plus il y a de catégories, plus il y a de confusion et plus il y a d'endroits où se cacher. Il convient également d'éviter d'augmenter la charge de déclaration pour les catégories intermédiaires et neutres, car ces catégories visent à améliorer les performances environnementales et à faire le bien.