Deux arrêts rendus en mars rappellent l’importance pour les sociétés d’anticiper le risque associé à l’ajout ou à l’abandon d’une activité si elles ne veulent pas perdre le droit au report de leurs déficits fiscaux.
Afin de lutter contre les pratiques de « marché de déficits », la première loi de finances rectificative pour 20121 a durci les règles relatives à la conservation et au transfert de ces déficits, d’une part en modifiant les conditions à satisfaire pour obtenir leur transfert en cas de fusion2 et, d’autre part, en objectivant la notion de changement d’activité qui entraîne automatiquement, sauf obtention d’un agrément, la perte des déficits pour la société concernée3.
Ainsi, depuis cette réforme qui visait à contrer une jurisprudence jugée trop libérale4, constituent un changement d’activité :
– la disparition des moyens de production pendant une durée de plus de 12 mois ou lorsque cette disparition est suivie d’une cession de la majorité des droits sociaux ; ou
– l’adjonction ou l’abandon/transfert d’une activité se traduisant par la hausse ou la baisse de plus de 50 %, soit du chiffre d’affaires, soit de l’effectif et du montant brut des éléments immobilisés, entre l’exercice précédant l’événement (N-1) et l’exercice de cet événement (N) ou l’exercice suivant (N+1).
Si ces dispositions n’ont pas encore donné lieu à une jurisprudence fournie, deux arrêts rendus en mars sont venus en faire application.
Dans le premier5, la cour administrative d’appel de Lyon a retenu l’existence d’un changement d’activité dans le cas d’une société qui exerçait une activité de commerce de gros alimentaire depuis 1977 et une activité de production de plats cuisinés depuis 2003 et qui avait arrêté cette dernière activité en 2012, entraînant une baisse de plus de 80 % de ses effectifs et de 100 % du montant de son actif brut immobilisé. Si la société soutenait pour se défendre que l’abandon de l’activité remontait en réalité à 2008, soit avant l’entrée en vigueur des nouvelles règles, dès lors que le volume d’activité avait significativement baissé depuis cette date, la cour relève que l’actionnaire majoritaire de la société avait annoncé l’abandon de l’activité litigieuse en 2012 et que l’administration démontrait bien que les conditions d’application du texte étaient satisfaites au titre de cet exercice.