Nombre de non-résidents, qu’ils résident dans l’Union européenne (UE) ou dans un pays tiers, se sont émus de se voir imposés, à compter de l’année 2012, aux prélèvements sociaux (CSG/CRDS/prélèvement de 2 % et sa contribution additionnelle) sur les revenus fonciers et les plus-values immobilières de source française, ce qui n’était pas la pratique jusque-là.
Par Pierre-Jean Douvier, avocat associé, et Xenia Lordkipanidzé, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre
En effet, les prélèvements sociaux étant destinés à financer le système de sécurité sociale français, dont les non-résidents ne profitent guère, ces derniers n’y étaient pas assujettis.
Ce changement de législation a entraîné une vague de réclamations auprès des services fiscaux mais également une procédure en infraction contre la France initiée par la Commission européenne (aff. 2013/4168 Pilot).
En parallèle, une question préjudicielle a été posée à la CJUE par le Conseil d’Etat sur la pertinence de l’application de prélèvements sociaux français sur les revenus du patrimoine des non-résidents à la lumière du règlement n° 1408/71 visant à la coordination des législations nationales en matière de sécurité sociale et ce, afin d’assurer la libre circulation des travailleurs au sein de l’UE (aff. C-623/13, de Ruyter). La procédure en infraction et la réponse du gouvernement français sont aujourd’hui suspendues à la décision de la CJUE. L’avocat général auprès de la CJUE considère dans ses conclusions que le règlement précité est applicable aux contributions sociales françaises prélevées sur les revenus du patrimoine, rendant ainsi impossible leur application à un non-résident qui serait affilié à la sécurité d’un autre Etat membre (généralement en raison de l’activité professionnelle exercée dans cet Etat).
Un raisonnement similaire est ouvert aux contribuables résidant hors UE dans un Etat lié à la France par une convention en matière de sécurité sociale.
Enfin, les impositions contestées constituent, à notre sens, une entrave à la libre circulation des capitaux (argument applicable avec les pays tiers à l’UE) dès lors que les intéressés ne bénéficient pas de la protection sociale française et qu’ils ne peuvent en outre déduire, contrairement aux résidents, une fraction de la CSG de leurs revenus imposables en France.