La notion de bénéficiaire effectif, qui concerne les dividendes, intérêts et redevances, n’est pas nouvelle mais l’administration fiscale en fait de plus en plus usage pour refuser le bénéfice d’une convention ou d’une directive. Dans ce contexte, il nous a paru utile de faire un état des lieux de la jurisprudence récente, qui donne des indications pertinentes pour la mise en place de structures d’investissement et de financement ainsi que de flux d’incorporels.
1. La définition du bénéficiaire effectif : un concept ancien et distinct de l’abus
La notion de bénéficiaire effectif est apparue dès 1977 dans le modèle OCDE de convention fiscale. L’OCDE indique qu’il serait contraire à l’objet de la convention d’octroyer une réduction ou exonération à un résident d’un Etat qui agit comme un simple relais (celui qui formellement apparaît comme propriétaire du revenu mais qui ne dispose, en pratique, que de pouvoirs très limités qui font de lui un simple administrateur) pour le compte d’une autre personne qui bénéficie réellement du revenu.
Dans ses commentaires de la convention modèle de 2017, l’OCDE réaffirme que la notion de bénéficiaire effectif ne doit pas être utilisée de façon étroite et technique, et « doit être entendue dans son contexte et à la lumière de l’objet et du but de la convention fiscale, notamment pour éviter la double imposition et prévenir l’évasion fiscale ». Cela implique une analyse basée non seulement sur les aspects juridiques mais également sur les faits et circonstances qui limitent la possibilité d’en jouir ou de les utiliser à sa discrétion. Si l’on comprend le sens général, les applications pratiques de cette analyse de fait restent délicates.
L’administration fiscale française reprend ces commentaires aux BOFiP relatifs aux conventions franco-algérienne et ouzbèke1. Notons aussi que si certaines conventions anciennes ne font pas mention du bénéficiaire effectif pour l’application de leurs dispositions, le Conseil d’Etat a, dès 19992, validé le principe d’une clause implicite de bénéficiaire effectif lorsque celle-ci n’est pas expresse.