Depuis plus d’un an, les taux d’intérêts à court et moyen termes sont devenus négatifs. Seul le taux de l’OAT 10 ans est encore légèrement positif. Cette situation est inédite par sa durée. Quels sont les impacts sur la juste valeur du patrimoine des entreprises industrielles et commerciales ?
Par Hugues de Noray, associé, Advolis
1. En quoi les taux d’intérêt négatifs sont-ils une «anomalie» ?
Parce que la monnaie est considérée comme un actif, c’est-à-dire un élément du patrimoine susceptible de générer des «avantages économiques futurs». Avec des taux d’intérêt négatifs, les placements coûtent de l’argent et les dettes rapportent des intérêts. Cette situation doit être nuancée par l’analyse des taux d’intérêt réels. Ainsi, pour l’OAT 10 ans, la prise en compte de l’inflation, qui est passée de 0,9 % en 2013 à un niveau quasi nul en 2015, limite la baisse autour de 45 pb.
De nombreuses analyses ont expliqué l’origine et la durée de la situation actuelle. S’il ne fallait retenir que trois paramètres : le contexte proche de la déflation, le niveau quasi historique des excédents de liquidité de l’Eurosystème et les choix de politique monétaire de la BCE.
2. Comment la norme IFRS 13 prévoit-elle d’utiliser les taux d’intérêt et les courbe de taux ?
Selon IFRS 13 § 82, les taux d’intérêt et les courbes de taux correspondent à des données de «niveau 2» qui sont observables «aux intervalles usuels» sur le marché.
Certaines circonstances de marché peuvent conduire à ajuster les données observables : lorsque l’application de la donnée de marché n’est pas directement transposable à la situation de l’actif ou du passif évalué (IFRS 13 § 39), ou lorsqu’une perturbation de marché se manifeste par une baisse sensible du volume ou du niveau d’activité pour un actif ou un passif (IFRS 13 § B37 à B47). Mais il ne nous semble pas possible d’extrapoler l’application de ces paragraphes à l’échelle du marché des taux d’intérêt, et d’autant moins que les courbes de taux s’inscrivent désormais dans des tendances claires.
IFRS 13 ne fournit donc pas d’indication sur la conduite à retenir, en dehors d’une stricte application de la permanence des méthodes.
3. Les modèles de calcul des taux d’actualisation sont-ils adaptés ?
Les modèles académiques de calcul du taux d’actualisation comme le coût du capital (modèle MEDAF) et comme le coût moyen pondéré du capital (CMPC) intègrent une composante de «taux sans risque».
Pour IFRS 13 § B13, le taux sans risque correspond à «la valeur temps de l’argent, représentée par le taux sur des actifs...