Dans une décision du 9 octobre 2024, le Conseil d’Etat juge que la prorogation d’un usufruit temporaire précédemment cédé et portant sur un ensemble immobilier constitue une première cession d’un usufruit distinct de celui initialement transmis. Il conclut à l’imposition du profit tiré de cette opération dans la catégorie des revenus fonciers en application de l’article 13 5° du CGI.
La mesure anti-abus introduite fin 2012 à l’article 13 5° du CGI s’applique à la première cession à titre onéreux d’un même usufruit temporaire et a pour objet d’imposer le produit d’une telle cession selon les règles applicables aux revenus susceptibles d’être produits par les biens dont l’usufruit est transmis. Le Conseil d’Etat juge que la prorogation d’un usufruit temporaire précédemment cédé est une première cession pour l’application de cette disposition.
Cette solution confirme, en la clarifiant, la décision rendue dans cette affaire par la cour administrative d’appel (CAA) de Nancy le 9 novembre 20232.
Sa cohérence, notamment au regard des objectifs poursuivis par le législateur, ne doit cependant pas faire oublier les scories inhérentes au mécanisme légal et le risque de potentielle double imposition.
1. Présentation de la situation considérée
Dans l’affaire soumise au Conseil d’Etat, le gérant et associé majoritaire d’une SCI a fait procéder à la cession par cette société, en septembre 2004, d’un usufruit temporaire d’une durée de onze ans sur un ensemble immobilier à une SARL dont il détenait également la majorité des parts.
Fin août 2015, les parties sont convenues de proroger la durée de cet usufruit pour une durée supplémentaire de six ans.
A la suite d’un contrôle, l’administration fiscale a estimé que la plus-value déclarée par la SCI devait être requalifiée et imposée dans la catégorie des revenus fonciers en application des dispositions précitées du 1° du 5 de l’article 13 du CGI.
La SCI a contesté ces rappels mais la CAA de Nancy a rejeté sa requête en jugeant que l’opération constituait « la première opération intervenue postérieurement » à l’entrée en vigueur du dispositif le 14 novembre 2012 et que la régularité juridique de la prorogation d’un usufruit temporaire ne « saurait, eu égard à l’objectif poursuivi par le législateur de lutter contre certains schémas d’optimisation fiscale, faire obstacle à l’application du dispositif ».