L’élan vers la décarbonation et le contexte macroéconomique de forte volatilité des prix de l’énergie conduisent actuellement les entreprises à accroître le recours aux contrats d’achat physique d’électricité d’origine renouvelable (dits « PPA », « power purchase agreements »). Ces contrats répondent en effet à un double objectif : sécuriser un approvisionnement à prix fixe sur le long terme et bénéficier d’une source d’énergie verte. Ayant soulevé de nombreuses difficultés d’application, la comptabilisation des PPA physiques est désormais inscrite au programme de travail du normalisateur comptable.
1. Le contexte normatif
La comptabilisation des PPA physiques est à la croisée du champ d’application de plusieurs normes. En l’absence d’un quelconque lien de contrôle sur la société portant le projet (norme IFRS 10), ou d’un contrat de location avec celle-ci (norme IFRS 16), se pose la question de savoir si ces contrats doivent être traités dans le champ de la norme IFRS 9 relative aux instruments financiers, dès lors que la production d’énergie n’est pas directement reliée au point de consommation (PPA dits « off-site »).
Au regard d’IFRS 9, lorsqu’un contrat d’achat portant sur un sous-jacent non financier (tel que l’électricité) est conclu en vue des besoins propres à l’activité de l’entreprise, une dérogation pour usage propre (dite « own use ») est prévue, évitant la comptabilisation du contrat d’achat comme un instrument financier dérivé.
Or, les entreprises rencontrent des difficultés à appliquer cette dérogation aux PPA physiques, du fait de l’existence d’une inadéquation structurelle entre la production et la consommation d’électricité verte. En effet, alors que le rendement des parcs éoliens ou solaires dépend des conditions météorologiques ou de la saisonnalité, les besoins d’énergie de l’acheteur sont pour leur part fonction du degré d’utilisation de son outil de production (arrêt/ralentissement pendant certaines périodes : nuit, week-ends, congés, maintenance, etc.). Cette inadéquation, ainsi que l’insuffisance des capacités de stockage de cette énergie, contraignent l’acheteur à revendre immédiatement sur le marché l’énergie excédentaire non consommée, ce qui fragilise l’éligibilité de ces contrats à la dérogation own use.