Une «relecture» des dispositions relatives à la territorialité des droits de successionet de donation serait-elle concevable ? La question est aujourd’hui ouverte mais elle doit être prise en considération en cas de changement de résidence fiscale.
Par Eric Ginter, avocat associé, et Eric Chartier, avocat counsel, Hoche Société d’Avocats
Les droits de succession français, qui sont particulièrement lourds, sont en principe applicables à l’ensemble des biens laissés par une personne qui, au moment de son décès, avait la qualité de résident fiscal de France, au sens de l’article 4B du CGI, ainsi qu’en dispose le 1e de l’article 750 ter du CGI.
Cette condition sera remplie même dans l’hypothèse où le défunt ne résidait pas effectivement en France mais qu’il avait dans notre pays l’essentiel de son patrimoine ou qu’il en tirait l’essentiel de ses revenus, même si ceux-ci étaient essentiellement passifs (pensions de retraite par exemple), ainsi que cela a pu être jugé.
Ce principe général peut toutefois être mis en échec par l’application des conventions fiscales.
S’agissant des droits de succession, on notera toutefois que celles-ci sont bien moins nombreuses que celles qui sont applicables à l’impôt sur le revenu (35 contre 122).
Mais, même dans cette hypothèse, il n’est pas certain que les conventions puissent faire échec à l’application du droit français lorsque la succession du défunt n’est pas effectivement soumise aux droits de succession dans l’Etat où il résidait.
Cette situation peut se rencontrer dans deux cas :
– soit qu’il n’y ait pas de droit de succession dans l’Etat de résidence : en général, il n’y aura alors pas de convention conclue avec la France, mais il y a des exceptions à cette situation (l’Italie par exemple) ;
– soit, et c’est la situation la plus délicate, qu’il existe des droits de succession mais que ceux-ci ne soient pas applicables au cas d’espèce dès lors que le défunt bénéficiait de son vivant d’un régime fiscal privilégié qui s’étend aux droits de succession, situation qui se retrouve notamment dans certains régimes applicables aux «impatriés».
Dans l’un et l’autre cas, l’application de la convention fiscale conclue par l’Etat de résidence avec la France pourrait être paralysée du fait que la succession n’est pas soumise à l’impôt, en tout ou partie, dans l’Etat de résidence du défunt.