On sait, depuis la décision Cérès du Conseil d’Etat en mai 2018, que l’administration fiscale est fondée à corriger le résultat imposable d’une société si celle-ci acquiert par voie d’apport en nature des actifs pour une valeur fixée à un montant délibérément inférieur à la valeur réelle desdits actifs.
Par Vincent Agulhon, avocat, Darrois Villey Maillot Brochier AARPI
C’est en invoquant ce principe que l’administration fiscale avait procédé au redressement du résultat imposable de la Société Nouvelle Cap Management (SNCM) après avoir constaté qu’elle avait acquis 50% du capital de sa filiale Société Cap Management par voie d’apport en nature consenti par l’un des deux associés de cette dernière pour une valeur d’apport égale à un cinquième seulement du prix d’achat du solde du capital, soit 50%, auprès du second associé. Il est vrai que, sans autre élément de contexte, la disproportion entre les valeurs respectives d’apport et d’achat des titres de la même société pouvait faire apparaître une forte sous-évaluation de l’apport. La relation d’intérêt liant l’apporteur à la société bénéficiaire permettait par ailleurs de présumer l’intention libérale de l’apporteur en faveur de la holding SNCM, de sorte que les critères d’application de la jurisprudence Cérès semblaient réunis. Ayant à connaître de cette affaire pour une seconde fois à l’occasion d’un pourvoi formé contre la décision de renvoi de la cour d’appel, le Conseil d’Etat – qui devait dès lors statuer au fond – s’est pourtant livré à une analyse très pragmatique des circonstances de l’espèce qui lui a permis d’écarter l’apparence peu flatteuse des faits ainsi décrits. Il a tout d’abord constaté que, pour les besoins de l’opération globale de reprise de la société Cap Management p...
