Dans un arrêt prononcé le 29 septembre 2015, la Cour de cassation a rappelé qu’une double condition doit impérativement être remplie afin de pouvoir prétendre à la désignation judiciaire d’un administrateur provisoire. Cette mesure conserve ainsi son caractère exceptionnel, dans laquelle la préservation de l’intérêt social est une condition certes nécessaire, mais pas suffisante.
Gilles Vermont, avocat of counsel, Delsol Avocats
Le droit des sociétés obéit au principe de non-immixtion du juge dans les affaires sociales. La jurisprudence veille à ce que toute entorse à ce principe reste exceptionnelle, mais il arrive que le fonctionnement d’une société soit entravé voire totalement paralysé (hostilité des associés rendant impossible la tenue des assemblées générales, désaccords entre gérants égalitaires, dirigeant faisant l’objet de poursuites pénales, etc.). Nombreuses sont donc les situations dans lesquelles un associé ou un dirigeant estime que la société est menacée et qu’il convient de charger un administrateur judiciaire, dénommé pour l’occasion administrateur provisoire, de la gérer le temps de mettre un terme à ces difficultés.
Les conditions auxquelles un administrateur provisoire peut être désigné ont été clairement fixées par la cour de cassation, dont les arrêts1 rappellent invariablement que «la désignation judiciaire d’un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d’un péril imminent».
Des associés mécontents de leurs dirigeants, mais ne disposant pas de la majorité nécessaire pour les révoquer, ont toutefois été tentés de solliciter en justice la désignation d’un administrateur provisoire, et ce alors même que les organes de gestion de la société fonctionnaient normalement. Les tribunaux ont parfois accueilli favorablement de telles demandes, au...