Par deux décisions rendues le 18 juillet 20231, le Conseil d’Etat s’est aligné sur la position de la CJUE en jugeant que les dividendes versés par une filiale européenne « intégrable » à sa société mère non membre d’un groupe d’intégration fiscale devaient bénéficier de la neutralisation de la quote-part de frais et charges de 5 %.
Pour rappel, les sociétés BIF et Manitou BF avaient perçu en 2011 et 2012 des dividendes de filiales européennes, taxés à hauteur de 5 % de leur montant. En réponse à leurs réclamations, l’administration avait refusé la neutralisation de cette QPFC, malgré l’arrêt Steria rendu pendant l’instruction de ces demandes2, au motif que l’absence d’intégration était un choix des sociétés. En effet, la société Manitou BF n’avait pas, en tant que société mère, constitué de groupe fiscal avec ses filiales françaises et la société BIF n’avait, quant à elle, pas opté pour rejoindre le groupe fiscal constitué par sa société mère.
Selon l’administration, c’est le caractère volontaire de l’absence d’intégration fiscale qui faisait obstacle à la neutralisation de la QPFC, contrairement aux cas des sociétés mères françaises isolées dans l’impossibilité de constituer un groupe fiscal.
Infirmant cette position, la Cour de Luxembourg a jugé le 11 mai dernier que l’absence de neutralisation de la QPFC dans ces situations était contraire à la liberté d’établissement3. En substance, elle estime que même sans avoir choisi d’intégrer fiscalement ses filiales résidentes, une société mère aurait pu souhaiter constituer un groupe d’intégration avec ses filiales européennes et qu’ainsi la situation des sociétés appartenant à un groupe fiscal était comparable à celle de sociétés non intégrées, « à l’égard d’une réglementation prévoyant, non pas l’intégration fiscale, mais l’exonération fiscale totale des dividendes perçus, par l’effet de l’avantage fiscal en cause ».