Attendue, parfois en tremblant, depuis plus de dix ans, la réforme du droit des contrats, du régime des obligations et de la preuve est désormais chose faite depuis la publication de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (l’«ordonnance»).
Par Alexandre Bordenave, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre
Si, dans un souci de lisibilité et de sécurité juridique, l’ordonnance «prévoit, pour sa majeure partie, une codification à droit constant de la jurisprudence1», elle n’est pas avare de changements, à l’image de ses dispositions relatives, respectivement, à la cession de créance, de dette et de contrat.
De l’avis général, il était temps de moderniser la cession de créance, ce que l’ordonnance s’emploie à faire aux nouveaux articles 1321 et suivants du Code civil. Pour l’essentiel, ce dépoussiérage procède de la suppression de l’exigence aux fins d’opposabilité aux tiers de la signification prévue par l’article 1690. En effet, le droit nouveau dispose qu’«entre les parties, le transfert de la créance s’opère à la date de l’acte [et] est opposable aux tiers dès ce moment» (article 1323 al. 1 et 2). Quant au débiteur, à moins qu’il n’y ait consenti préalablement, la cession lui sera opposable au moyen d’une simple notification ou «s’il en a pris acte» (article 1324). Pour le reste, en matière de cession de créance, l’ordonnance ne modifie pas le droit positif : tout au plus, codifie-t-elle quelques jurisprudences bien connues. Au final, le régime de cession de créance de droit commun issu de l’ordonnance paraît se rapprocher sensiblement de celui de la «cession Dailly» des articles L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier, dont il pourrait, dans certains cas, devenir le concurrent. Toutefois, on peut regretter que, tout en prévoyant la possibilité d’une cession à titre gratuit, l’ordonnance n’ait pas consacré une cession de créance de droit commun à titre de garantie, à laquelle s’oppose la Cour de cassation2.