Pour la haute juridiction, la diffusion d’informations couvertes par la confidentialité «sans qu’il soit établi qu’elles contribuent à l’information légitime du public sur un débat d’intérêt général» constitue, à elle seule, un trouble manifestement illicite.
Par Arnaud Reygrobellet, professeur à l’université Paris X, Of Counsel, CMS Bureau Francis Lefebvre
Les procédures de prévention des difficultés des entreprises sont conçues pour être confidentielles. A cela, deux raisons qui se combinent. D’abord, il est bien connu que toute publicité donnée à l’existence de ces difficultés, même embryonnaires, est un facteur direct d’aggravation de celles-ci. Le chef d’entreprise n’acceptera d’initier une telle procédure que s’il a la garantie que son existence ne sera pas révélée sur la place publique. Ensuite, les quelques partenaires de l’entreprise (banques, fournisseurs) impliqués dans le processus de négociation n’ont aucun intérêt à dévoiler aux tiers les concessions qu’ils sont disposés à consentir dans ce cadre. En d’autres termes, la confidentialité est la condition d’un déroulement loyal et transparent des négociations.
C’est pourquoi l’article L. 611-15 du Code de commerce énonce que «toute personne qui est appelée à la procédure de conciliation ou à un mandat ad hoc ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité». L’exigence de confidentialité est d’autant plus forte qu’elle ne se limite pas à la mise en place de la procédure amiable. Elle se prolonge jusqu’à la clôture de la procédure puisque la décision constatant l’accord n’est pas soumise à publication (C. com., art. L. 611-8, I), tandis que celle homologuant l’accord ne fait l’objet que d’une diffusion limitée.
Mais quelle est la force de cette contrainte, lorsqu’elle se trouve confrontée au principe fondamental de la liberté d’expression ? Plus exactement, l’exigence de confidentialité doit-elle prévaloir sur la liberté d’informer du journaliste ?