Cet article propose de se concentrer sur les ICO (initial coin offerings) et l’intérêt d’y adosser un contrat de fiducie lors de leur mise en place pour rassurer les acheteurs. Les ICO ont été encadrées par le régulateur français depuis la loi Pacte, afin notamment de protéger le grand public cherchant à investir dans ce type d’opération ; il est cependant certain qu’une des difficultés, pour les porteurs de projets, est de pouvoir trouver des personnes susceptibles d’acheter leurs tokens. La fiducie ne servira donc pas à sécuriser les investisseurs sur la valeur du token, mais elle pourrait cependant limiter les exit scams (les escroqueries) et les porteurs de projet peu scrupuleux.
Par Arnaud Raynouard, professeur des universités à l’Université Paris Dauphine-PSL et responsable du comité scientifique juridique, Céline Moille, avocate, et Marie Waechter, avocate, Deloitte | Taj
1. La technologie blockchain
La technologie blockchain se développe depuis plusieurs années et les mots cryptoactifs, bitcoin, DeFi ou encore token sont de plus en plus présents dans la sphère économique et juridique. Il existe deux sortes de mécanismes donnant lieu à l’émission de tokens ou de jetons ; les STO, security token offerings (émission de security tokens ou « jetons titres financiers ») et les ICO, initial coin offerings (émission d’utility tokens traduits par « jetons utilitaires » ou « jetons d’usage »). Une société émet ainsi des jetons, en échange d’un montant déterminé dans une cryptomonnaie. La société émettrice demeure libre de déterminer les droits attachés à ces jetons.
2. La récente régulation des ICO en droit français
Afin de sécuriser les offres de jetons utilitaires, la loi Pacte a introduit un nouveau régime pour les cryptoactifs en France. L’un des objectifs de cette loi est de moderniser la législation et de s’adapter aux innovations technologiques. Depuis la promulgation de cette loi, chaque ICO peut bénéficier du visa optionnel de l’Autorité des marchés financiers. M. Ophèle, président de l’Autorité, a décrit cette procédure comme « des règles de bon sens. Ce régime permet d’aborder une matière innovante avec un cadre proportionné, à la fois protecteur pour l’investisseur et favorable à l’innovation. Nous faisons le pari qu’il attirera les bons projets ».
Pour garantir l’information et la protection des personnes qui achètent des tokens, l’AMF va vérifier que l’émetteur de jetons est une personne morale établie ou immatriculée...