La loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 marque un tournant dans la protection du secret des affaires, jusqu’alors particulièrement vulnérable.
En transposant en droit français la directive n° 2016/943/UE du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites (JOUE, n° L. 157, 15 juin), le législateur a instauré un régime protecteur autonome du secret des affaires.
Cinq ans après la promulgation de cette loi, des interrogations pratiques demeurent quant à la mise en œuvre de cet arsenal législatif.
1. Avant d’espérer faire valoir la protection introduite par cette loi de 2018, l’entreprise doit tout d’abord être en mesure de déterminer ce que recoupe exactement cette notion de « secret des affaires »
En effet, une information ne pourra bénéficier du « secret » que dès lors qu’elle répondra à trois critères cumulatifs (C. com., art. L. 151-1) :
– l’information ne doit pas être généralement – ne concerne donc a priori pas la diffusion restreinte d’une information – connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ;
– l’information doit faire l’objet de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret. Ce critère met donc à la charge du détenteur légitime du secret une obligation spécifique de confidentialité et de sécurité ;
– enfin, l’information doit présenter une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret.
Cette définition du secret des affaires est étroitement liée à celle du « détenteur légitime » du secret, auquel incombe un certain nombre d’obligations. Le détenteur d’un secret des affaires est celui qui en a le contrôle de façon licite, soit par :
– une découverte ou une création indépendante ;
– un procédé d’ingénierie inverse, c’est-à-dire l’observation, l’étude, le démontage ou le test d’un produit ou d’un objet qui a été mis à la disposition du public ou qui est de façon licite en possession de la personne qui obtient l’information.
Ainsi, c’est ce détenteur qui pourra prétendre à la protection du secret qu’il détient et agir pour en faire valoir le bénéfice tout au long de la vie courante de l’entreprise.
Mais plusieurs interrogations peuvent surgir lorsque ce secret est menacé par le recours à une voie de droit totalement légale. En effet, la protection du secret des affaires telle qu’elle résulte de ce régime n’est pas absolue et peut entrer en conflit avec d’autres droits légitimes comme celui du droit à la preuve. Dans ces conditions, l’appareil juridictionnel doit être en mesure de permettre la protection du secret des affaires et éviter toute atteinte disproportionnée.
2. Dans l’hypothèse d’un contentieux opposant des concurrents, il est fréquent que l’un d’entre eux ait recours au référé probatoire de l’article 145 du Code de procédure civile afin d’obtenir des mesures d’instruction avant tout procès
2.1. Avant...