Le Conseil d’Etat a rendu le 14 octobre 2022 (CE, 3-8 chambres réunies, 14/10/2022, n° 443869) une décision de principe qui, sans exclure de fait la recherche dans le domaine du droit, a jugé inéligibles au bénéfice du crédit d’impôt recherche (CIR) les dépenses de personnel afférentes à une doctorante en droit. Celle-ci était salariée d’une société d’avocats et menait dans le cadre de son travail de thèse des recherches sur les particularités de la procédure de divorce.
Cet arrêt a confirmé la position de l’administration et des tribunaux de première instance et d’appel (CAA Bordeaux) dont l’instruction avait considéré que ces travaux avaient pour objet une analyse de dispositifs existants et applicables et n’étaient pas éligibles bien que réalisés dans le cadre d’une thèse en droit éligible au dispositif Cifre. Cette décision retient la même solution que la cour administrative d’appel de Paris concernant une autre thèse Cifre en cabinet d’avocats (CAA de Paris, 27 novembre 2014, SELAS Bruno Kern Avocats, n° 12PA05144).
1. La porte de la recherche en droit n’est pas totalement fermée…
L’arrêt du Conseil d’Etat est inédit en ce qu’il aborde la question de la possibilité, ou non, pour des recherches en droit (et plus généralement des recherches dans le domaine des sciences humaines et sociales) d’être considérées comme de la recherche scientifique au sens du CIR. En réalité, les textes ne se penchent pas directement sur la question, et rien ne laisse à penser que le législateur aurait délibérément disqualifié les travaux de recherche dans les sciences humaines et sociales du champ d’application du CIR. Le Code général des impôts précise que les opérations scientifiques au sens du CIR concernent la recherche fondamentale, la recherche appliquée et le développement expérimental.
Plus précisément, la recherche appliquée correspondrait aux activités qui « visent à discerner les applications possibles des résultats d’une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l’entreprise...