Dans deux arrêts prononcés les 9 juin et 22 septembre 2015, la cour d’appel de Paris a été amenée à se prononcer sur des cas de révocation de mandataires sociaux qui, bien que non fautifs, affichaient une divergence de vue persistante avec leurs actionnaires. Ces décisions sont l’occasion de rappeler la singularité de la notion de mésentente, qui constitue à elle seule un juste motif de révocation.
Par Gilles Vermont, of counsel, Delsol avocats
La jurisprudence encadre chaque jour davantage la révocation des mandataires sociaux : le respect du contradictoire, l’interdiction des mesures vexatoires sont des principes constamment rappelés par les tribunaux lorsqu’ils sont amenés à se prononcer sur la révocation d’un mandataire social. Dans les sociétés anonymes et les sociétés par actions simplifiées, le principe de libre révocabilité des dirigeants sociaux et de leur révocation ad nutum devrait pourtant laisser la plus grande latitude aux associés.
Force est de constater que le principe de la révocation ad nutum est en train de céder le pas. Le juste motif de révocation, ou même la faute, deviennent des notions centrales dans les contentieux en raison notamment de dispositions contractuelles liées, directement ou indirectement, à la révocation. En effet, les mandats sociaux ou les pactes d’actionnaires font souvent référence à la notion de juste motif voire fréquemment à la notion de faute pour conditionner par exemple le droit du dirigeant révoqué à son indemnité de révocation ou pour fixer les conditions de rachat de ses actions (par le jeu des options stipulées dans les pactes).
Dans ce contexte, la notion de mésentente présente la singularité d’être indépendante de toute faute. La mésentente, également nommée divergence de vues, constitue bien un juste motif de révocation d’un dirigeant sans qu’il soit besoin de caractériser une quelconque faute à son encontre1.
Le critère pris en compte par les tribunaux est dans...