L’acquisition de la propriété d’un bien en démembrement est une stratégie patrimoniale bien connue des praticiens, notamment pour financer l’immobilier d’entreprise. La jurisprudence récente du juge de l’impôt apporte à cet égard un éclairage intéressant sur certaines problématiques pratiques.
Par Philippe Gosset, avocat, et Isabelle Pichard, avocate, CMS Francis Lefebvre Avocats
Plus ou moins sophistiquée, la technique de l’acquisition d’un bien immobilier professionnel en démembrement repose sur une base commune : l’entreprise acquiert l’usufruit des locaux d’exploitation pour une durée fixe alors que la nue-propriété est détenue par son associé personne physique.
Cette structuration présente un certain nombre d’avantages. En tant que détentrice de l’usufruit, la société exploitante n’a plus à faire face au versement des loyers pendant la période couverte par le droit d’usufruit, mais au financement d’échéances d’emprunt ce qui, en période de taux d’intérêt bas notamment, peut être nettement plus intéressant. Par ailleurs, au terme du démembrement, la pleine propriété se reconstitue dans le patrimoine de l’associé, sans imposition. L’associé peut alors céder l’immeuble ou le donner à bail, ce qui lui assure une rente pour sa retraite.
Le législateur a mis un sérieux coup de frein à cette pratique en 2012. Depuis le 14 novembre 2012 en effet, l’article 13-5 du Code général des impôts (CGI) prévoit, dans certains cas de figure, l’imposition du prix de vente de l’usufruit temporaire dans la catégorie des revenus fonciers (plus lourde que celle des plus-values), entre les mains du vendeur, et ce en totalité l’année de la cession.
Si ce dispositif embrasse large, certains schémas d’acquisition en démembrement conservent malgré tout leur intérêt et la jurisprudence rendue en la matière, particulièrement riche en 2018, est scrutée avec d’autant plus d’attention. Petit tour d’horizon.