Pour le Conseil d’Etat, l’octroi d’avances rémunérées à une filiale en difficulté peut révéler une prise de risque inconsidérée.
Par Pierre Le Roux, avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre.
Dans un arrêt du Conseil d’Etat du 11 juin 2014 n° 363168, le Conseil d’Etat fait une nouvelle application de la notion prétorienne du risque manifestement excessif, théorie dont on sait qu’elle peut constituer une entrave à la liberté de gestion des entreprises. Il s’agit là d’un précédent dans le cadre des relations entre une société mère et sa filiale contrôlée.
Les faits étaient les suivants : dans les années 1990, Fralsen avait consenti à sa filiale française Timex contrôlée à 99,99 % des avances de trésorerie régulières assorties d’intérêts, dont elle avait décidé, en 1997, l’incorporation au capital dans le cadre d’une opération de coup d’accordéon destinée à solder les pertes antérieures de sa filiale (pour un montant cumulé de créances de près de 5,8 millions d’euros).
La situation nette de la filiale avait alors été rétablie à hauteur d’une somme (positive) de 1,1 million d’euros, mais Fralsen avait continué d’assurer ses besoins de trésorerie au moyen d’avances complémentaires rémunérées, la filiale n’ayant cessé d’enregistrer des résultats déficitaires.
Finalement, décision fut prise de dissoudre sans liquidation la filiale fin 2001. La mère a alors constaté une perte exceptionnelle de 3,5 millions d’euros, dont l’origine se trouvait dans la dette accumulée par la filiale, intérêts courus compris, depuis la recapitalisation de 1997.
L’administration avait estimé que la société Fralsen ne pouvait valablement supporter à fonds perdus les déficits de sa filiale, a...