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Abus de doctrine 

L’abus de droit sort-il de ses gonds ?

Publié le 15 février 2019 à 16h07

Harold Turot, Gide

L’un des derniers remparts contre l’insécurité fiscale est-il en train de céder ? La cour administrative d’appel de Paris, entrant en rébellion ouverte contre la jurisprudence établie du Conseil d’Etat, vient d’admettre que l’opposabilité de la doctrine par le contribuable qui s’y est conformé puisse être écartée en présence d’un montage artificiel. Les termes mêmes de l’arrêt, fondé sur des arguments techniques pour le moins incertains, sont susceptibles d’introduire une grave dissymétrie en défaveur du contribuable, à l’heure où l’élargissement de l’abus de droit a pourtant accru le risque de répression fiscale.

Par Harold Turot, avocat, Gide

A la lecture de l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Paris le 20 décembre 2018 (CAA Paris, 20 décembre 2018, n° 17PA00747), la solution peut sembler relever du bon sens. On sait que l’article 150-0 D ter du Code général des impôts (CGI) accorde aux dirigeants de PME, partant à la retraite, le bénéfice d’un abattement pour durée de détention sur les plus-values de cession à titre onéreux d’actions ou parts de leur société, à condition toutefois qu’ils ne détiennent, directement ou indirectement, aucun droit de vote ni droit financier dans la société cessionnaire pendant un délai de trois ans suivant la cession ; condition assouplie par l’administration dans une instruction, tolérant une détention d’au maximum 1 % de la société cessionnaire pendant la même période. En prévoyant cette tolérance contraire aux dispositions législatives, l’administration ne pouvait avoir eu l’intention d’étendre le bénéfice de l’abattement au contribuable cédant son entreprise à une société dont il détient en réalité plus de 1 %, mais qui use de montages, via des sociétés interposées et des hommes de paille, dans le but de passer sous cette barre pendant la durée légalement requise de trois ans.

Or c’est exactement la situation qu’avait à connaître la cour dans l’affaire jugée et on comprend que les juges n’aient pas résisté à la tentation de sanctionner des tels agissements. Les faits étaient-ils cependant plus choquants que ceux de l’affaire des fameux «fonds turbo» ayant donné lieu...

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