Dans un arrêt du 21 juin 2016, la Cour de cassation est revenue sur le préjudice dont le cessionnaire peut demander réparation en cas de dol dans le cadre d’une cession de droits sociaux1.
Par Elsa Rodrigues, avocate, STC Partners
1. La problématique liée au maintien du contrat de cession en présence d’un dol
Le dol est caractérisé lorsque les agissements trompeurs, manœuvres ou mensonges, du cédant au contrat de cession ont conduit le cessionnaire à donner son consentement à la cession alors qu’il ne l’aurait pas donné, ou bien sous d’autres conditions, en l’absence desdites manœuvres.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par le cédant d’une information dont il sait le caractère déterminant pour le cessionnaire. Cette dernière variété, appelée réticence dolosive, est la forme de dol la plus fréquemment rencontrée dans les contrats de cession de droits sociaux.
L’acquéreur de droits sociaux victime d’un dol se voit offrir plusieurs possibilités : il peut demander la nullité du contrat de cession et/ou des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’il a subi.
Si l’acquéreur choisit de réclamer des dommages et intérêts à l’exclusion de la nullité du contrat, se pose alors la question de savoir quel est le préjudice qu’il peut invoquer.
En effet, on peut imaginer que le cessionnaire qui s’est vu trompé par le cédant lors de l’acquisition des titres entende être indemnisé, si ce n’est du gain escompté dont il a été privé, à tout le moins de la perte de chance de l’obtenir.
La Cour de cassation ne l’a pas entendu de cette oreille.
Une société avait acquis l’intégralité des actions d’une autre société ayant pour activité la location longue durée de matériel informatique. Le cédant lui avait dissimulé l’existence de contre-lettres consenties par la société de location à certains de ses locataires qui leur permettaient d’acquérir le matériel loué à un prix résiduel avantageux en fin de contrat. Le cessionnaire a demandé à être indemnisé de la perte de chance d’obtenir les gains attendus qu’interdisaient les contre-lettres litigieuses sans solliciter la nullité du contrat, demande à laquelle la cour d’appel de Paris avait fait droit2.