Devant l’enjeu que représente le financement participatif, en matière bancaire comme en matière boursière, gouvernement et régulateurs ont fait preuve d’une réactivité inédite.
Par Ambroise Liard, avocat à la cour, Diametis AARPI
Le financement participatif (crowdfunding) consiste à collecter des fonds via une plateforme internet afin de financer un projet qui n’entre pas dans les critères institutionnels. Les fonds sont levés, pour un montant le plus souvent relativement faible, auprès d’un grand nombre de contributeurs.
Chaque plateforme collecte les fonds selon un modèle particulier :
– prise de participation en capital,
– prêts, rémunérés ou non,
– dons.
En France, la croissance des levées de fonds est exponentielle : 7,9 millions d’euros en 2011, 78,3 millions en 2013, 66 millions pour le premier semestre 2014 (dont 9,8 millions en equity, 37,4 millions en prêts et 19,2 millions en dons)1. En comparaison, sur la seule plateforme américaine Kickstarter, trois millions de contributeurs ont investi 480 millions de dollars en 2013 dans les 19 911 projets financés.
Et pourtant, la réglementation française est pionnière en la matière. Autant la SEC renâcle à adapter sa réglementation aux enjeux du crowdfunding et à faire appliquer le Jobs Act en vigueur depuis le 5 avril 20122, autant un cadre réglementaire a été mis en place entre mai et septembre 2014 :
– ordonnance n° 2014-559 du 30 mai 2014 relative au financement participatif ;
– décret n° 2014-1053 du 16 septembre 2014 ;
– arrêté du 22 septembre 2014 portant homologation des modifications du règlement général de l’Autorité des marchés financiers concernant le financement participatif ;
– arrêté du 24 septembre 2014 portant homologation des statuts de l’organisme en charge de la tenue du registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance ;
– position AMF sur le Placement non garanti et financement participatif (article D. 321-1 du Code monétaire et financier) – DOC-2014-10 ;
– document conjoint ACPR et AMF «S’informer sur le nouveau cadre applicable au financement participatif» publié le 30 septembre 2014.
Cette réactivité a vraisemblablement une explication simple : l’inédite économie collaborative que constitue le financement participatif pallie l’aversion au risque des acteurs classiques du financement. Or, ceux-ci ont considéré le financement participatif comme une atteinte au monopole bancaire ainsi qu’aux règles relatives à l’offre de titres au public et à la commercialisation des instruments financiers par des prestataires agréés.
Le cadre réglementaire mis en place aspire ainsi à concilier le développement d’un mode de financement innovant avec la protection des contributeurs comme des porteurs de projets.
De manière classique, le dispositif s’articule autour de l’instauration de seuils et d’agréments pour les acteurs, désormais institutionnalisés, du crowdfunding.
1. Des acteurs régulés
A l’enjeu inédit du financement participatif, la réponse est classique : créer de nouveaux statuts soumis au contrôle du régulateur.
En matière bancaire est instauré le statut...